Les députés du Parlement européen viennent d’adopter une résolution dénonçant les entraves à la liberté d’expression sur Internet (6/07/2006). Les eurodéputés condamnent les limitations relatives au contenu d’Internet imposées par des gouvernements qui développent une police des opinions pouvant conduire à l’emprisonnement des cyberdissidents. Plusieurs pays sont concernés par ces pratiques. Je trouve cette liste dans Libération du 7 juillet (source AFP) et j’imagine qu’elle n’est pas complète : Arabie Saoudite, Belarus, Chine, Corée du Nord, Cuba, Iran, Libye, Maldives, Birmanie, Népal, Ouzbekistan, Syrie, Tunisie, Turkmenistan et Vietnam. Le Parlement européen exprime également sa préoccupation face au comportement des compagnies privées qui coopèrent avec ces gouvernements pour mettre en place la censure : Yahoo, Google ou Microsoft. Selon le site 01net.com, la dépêche AFP mentionne également Telecom Italia et France Télécom. Les eurodéputés demandent au Conseil de l’Union -qui rassemble les Chefs d’Etat et de Gouvernement- et aux 25 Etats membres de publier une déclaration commune en faveur de la protection des droits des internautes et de la promotion de la liberté d’expression sur Internet, dans le monde entier. Les eurodéputés considèrent que la liberté d’expression étant « une valeur fondamentale partagée par tous les pays de l’Union » ils doivent en conséquence « prendre des mesures concrètes pour la défendre ». Le Parlement européen remplit pleinement sa mission d’assemblée démocratique et transnationale (cas unique au monde) en prenant position sur une question cruciale : si la censure d’Etat se réinvente sur la toile, c’est précisément parce qu’Internet peut contrarier le fonctionnement des régimes autoritaires en favorisant l’émancipation des sociétés civiles. En ce moment, sur ce réseau, la liberté d’usage est donc très inégalement répartie entre nous tous. Cette liberté dépend de la nature des régimes politiques, c’est-à-dire aussi de nos nationalités respectives. On voit, une fois encore, que si la nation est l’espace performant de la démocratie, elle est aussi l’espace efficace de tout régime autoritaire. Le post-nationalisme européen a été une réponse aux deux dérives du nationalisme que sont la guerre et la tyrannie. D’un côté, le Parlement européen qui est, dans le monde, l’unique point d’appui institutionnel d’une démocratie post-nationale car transnationale. D’un autre côté, Internet, qui rend techniquement possible l’émergence d’espaces publics transnationaux. C’est pourquoi la réaction vient de nations autoritaires, c’est-à-dire à la fois de « nations » en lutte contre le monde transnational et de régimes « autoritaires » en lutte contre les processus d’émancipation. Le pire serait que les grandes entreprises qui ordonnent Internet acceptent de rentrer dans ce jeu répressif. C’est pourquoi la résolution du Parlement européen revêt une importance toute particulière.
Bonjour,
J'ai cru comprendre que la Parlement européen se pose la question des libertés sur Internet à la suite du Congrès américain. Quand on sait que Google a accepté de créer une version spéciale pour la Chine dans laquelle "Tien an Men" donne de belles photos d'une place fleurie, il y a de quoi se poser des questions.
Il serait peut être temps que les instances européennes, qui par ailleurs veulent promouvoir les droits de l'homme, se posent ces questions et travaillent sur la cohérence horizontales de leurs politiques.
Il y a aussi un domaine connexe dans lesquel l'Union européenne devrait avancer: le "roaming", il est inadmissible de voir les opérateurs agir de la sorte (faire payer outrageusement les appels reçus à l'étranger) quand on veut construire un véritable espace européen. Cet été, nous traverserons 8 pays européens et cette histoire de téléphone est un véritable casse-tête !
- Bonjour,
Ma note visait précisément à mettre en lumière les efforts du Parlement européen pour soumettre le problème de la censure publique soutenue par des entreprises privées aux chefs d'Etat et de Gouvernement de l'Union. Quant au "roaming", je ne peux qu'être parfaitement d'accord avec vous. Je suis frappé de voir les entreprises jouer contre l'européanisation, dans ce cas, quand elles ont tellement joué en faveur de ce processus jusqu'à présent. Merci pour votre commentaire et vos remarques.
Amitiés, DR.
Rédigé par : philippe | 08 juillet 2006 à 20:49