Près de la moitié des Européens (45%) sont favorables à la poursuite de l’élargissement. Ceux qui déclarent y être opposés (42%) sont un peu moins nombreux. Compte tenu du contexte, de l’ambiance du moment (l’enquête a été conduite entre le 27 mars et le 1er mai), il me semble que l’on pouvait attendre un résultat moins enclin à l’ouverture. L’actualité européenne est pleine de figures anxiogènes qui toutes paraissent œuvrer au rapetissement de l’esprit public. Ecoutez, regardez, lisez et observez l’abondance de ces motifs d’affolement qui pourraient régénérer le mythe du nationalisme, dans sa version xénophobe : «terrorisme international», «délocalisations», «immigration», «globalisation», «conflit des civilisations»… On relève malgré tout de grandes différences selon les variables retenues. La prise en compte de la variable nationale montre que l’opinion est majoritairement opposée chez les Allemands (66%), les Luxembourgeois (65%), les Français (62%), les Autrichiens (61%) et les Finlandais (60%), tandis qu’elle est majoritairement favorable à un nouvel élargissement parmi les Britanniques (44%), les Irlandais (45%), les Portugais (47%), les Italiens (48%), les Suédois (49%), les Danois (51%), les Espagnols (55%), les Grecs (56%), les Polonais (72%) ou les Slovènes (73%). Je relève également des différences sensibles selon les variables sociodémographiques considérées : ainsi les Européennes sont moins favorables à l’arrivée de nouveaux pays (43%) que les Européens (47%) ; les jeunes âgés de 15 à 24 ans sont nettement plus favorables (56%) que leurs aînés, âgés de 55 ans et plus (35%). De même, plus les personnes interrogées ont un niveau d’éducation élevé et plus elles sont favorables à l’entrée de nouveaux Etats dans l’Union. Enfin, notons que les Européens qui se situent à gauche soutiennent davantage l’élargissement (50%) que les Européens qui se situent à droite (42%). Il faudra revenir sur cette vaste enquête d’opinion par sondage commandée par la Commission européenne qui vient d’en publier les principaux résultats.
L'élargissement en soi, les populations ne sont pas contre. Malheureusement, dès qu'on touche aux frustrations ou aux peurs, attention. Je me souviens d'une discussion avec une ancienne militante du Oui au TCE qui m'a clairement dit à la fin d'une discussion qu'elle ne voulait pas de la Turquie... à cause de l'Islam.
En fait, elle a tout à fait le droit de penser que es frontières de l'Europe ne vont pas au delà de la Grèce. Mais que fait-elle des milliers de musulmans européens ?
Bref, quand on voit comment on nous parle (pas) de l'entrée de la Bulgarie et de la Roumanie, il y a de quoi avoir peur parfois...
http://www.taurillon.org/article.php3?id_article=869&var_recherche=roumanie
Rédigé par : Fabien | 19 août 2006 à 11:01
Je crois, comme vous, que l'élargissement est une sorte de figure idéale capable de susciter les peurs les plus diverses. J'imagine que ni vous ni moi ne pouvons nous en étonner. Mais si d'un côté il y a ceux qui ont peur, c'est aussi parce que, d'un autre côté, il y a ceux qui affolent. Même en ne considérant pas que toutes ces peurs sont sans fondement, il y a un défaut massif de pédagogie. On parle beaucoup de déficit démocratique à propos de l'Europe, mais il me semble à ce jour plus pertinent, plus urgent, de souligner le redoutable déficit d'éducation. Si l'on combine l'absence d'une grande politique commune "d'éducation à l'Europe" avec l'absence d'information en matière d'élargissement, comme vous le soulignez, on ne peut que récolter en retour l'éclosion des préjugés et de toutes les peurs, qui font le miel de quelques entrepreneurs européens spécialisés dans l'appel au sursaut national, le plus souvent sur un registre identitaire. Dans de telles conditions, compte tenu de ces défaillances, je m'étonne que les enquêtes d'opinion n'enregistrent pas un rejet plus massivement exprimé.
Rédigé par : Reynié | 19 août 2006 à 12:19