Dans le cadre du programme «Le Futur de l’Europe», la Direction-Générale Communication de la Commission européenne a commandé une enquête d’opinion auprès de 25000 européens (février-mars 2006). Parmi les 24 questions posées, je relève une courte série qui teste la connaissance de l’Union en proposant 3 affirmations –vraies ou fausses. La personne interviewée doit dire si elle juge «vraie» ou «fausse» chacune de ces affirmations (ou bien répondre «je ne sais pas»). La connaissance de l’Union n’était pas l’objet principal de cette étude. Néanmoins, les informations fournies en ce domaine sont éclairantes, confirmant des études plus fouillées mais plus anciennes.
Première affirmation, «en ce moment, l’Union européenne compte 15 membres» : 30% des Européens interrogés ont considéré cette affirmation «vraie» et 21% ont dit ne pas savoir, soit un total de 51% (l’enquête ne dit pas si les 48% considérant l’affirmation «fausse» connaissaient tous le nombre de 25 Etats membres). Deuxième affirmation, «les députés européens sont directement élus par les citoyens de l’Union européenne», 33% des personnes interrogées ont jugé cette affirmation fausse et 19% ont déclaré ne pas savoir. Plus de la moitié (52%) des Européens interrogés semblent donc ignorer qu’ils sont chargés d’élire directement les membres du Parlement. Troisième affirmation, «notre pays possède un Commissaire européen», ce qui est le cas, en effet, pour chacun des pays de l’Union. Cette affirmation est reconnue exacte par 72% des personnes interrogées, tandis que 9% la jugent fausse et que 19% disent ne pas savoir. La notoriété, dans chacun des pays membres, du fait qu’il existe un Commissaire issu du pays de la personne interrogée témoigne de la force de l’appréhension nationale des questions européennes. Elle exprime, en même temps qu’elle explique, une des causes du malaise politique ressenti par de nombreux Européens. Il est contradictoire de promettre une organisation supranationale et démocratique en accordant moins de pouvoirs à un Parlement commun issu du suffrage universel direct qu’aux membres d’une Commission nommés par des gouvernements nationaux (c’est l’un des points que le Traité constitutionnel veut corriger). Le malaise est aussi un malentendu, sachant que les Commissaires européens ne représentent pas l’intérêt de leur pays mais bien différemment l’intérêt de l’Union. Cette méconnaissance favorise certainement la propagation de discours anti-européens, tels ceux décrivant le pouvoir de l’Union comme une sorte de chambre obscure où se construisent de funestes accords entre des élites complices, ou ceux qui assurent voir une espèce d’ONU locale qui serait le théâtre de difficiles négociations entre des nations demeurées profondément hostiles. Dans les deux cas, ces récits font référence à une organisation sans fondement ni contrôle démocratique. Les progrès en matière de démocratisation de l’Union sont fortement conditionnés par le niveau de formation et d’information des citoyens européens (voir l'étude).
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