Je signale, dans Le Figaro du 25 mai 2006, un point de vue de Jean-Luc Mélenchon, publié en même temps que celui de Paul-Marie Coûteaux, du MPF. On ne saurait leur reprocher de cohabiter ainsi, mais c'est comme un rappel ironique du combat qu'ils ont mené et gagné ensemble. Je note qu'ils n’en tirent pas les mêmes conséquences, un an après. C’est une première indication sur les contradictions qui traversent les élites du Non. Je peux penser qu’elles éprouveront les plus grandes difficultés à convaincre les 24 autres pays européens, si elles ne savent pas s’accorder entre elles dans leur propre pays. Jean-Luc Mélenchon, dont l’article vise finalement à soutenir la candidature de Laurent Fabius – tout ça pour ça ! – répète, une fois encore, que la figure xénophobe du « plombier polonais » a été inventée par Bolkestein. Ce dégagement est régulièrement utilisé parmi les élites du Non, notamment par Marie-George Buffet et les altermondialistes, par exemple Susan George.
Pourtant, non, ce n’est pas un étranger qui a inventé la désolante figure du plombier polonais, mais quelqu'un bien de chez nous et qui n'est autre que Philippe de Villiers. Toi, Jean-Luc, tu le sais probablement. Si j’étais joueur, pour connaître celui qui, dans l’équipe du MPF, a été particulièrement inventif dans cette affaire du plombier polonais, je te recommanderais de te pencher un peu, depuis ta chronique du Figaro, et de regarder ton voisin du dessous, tu y trouverais un indice.
Tu n’y es pour rien, mais ta cohabitation dans les colonnes de ce grand quotidien avec un villiériste, eurodéputé quand même, est comme une évocation subliminale de ce fameux dîner du 12 mai 2005, lorsque Laurent Fabius fut invité par les souverainistes membres de l’Académie du gaullisme, lesquels avaient appelé à voter pour Jean-Pierre Chevènement en 2002[1]. Paul-Marie Coûteaux était présent. Il avait toute sa place. Il fut proche de Jean-Pierre Chevènement puis de Philippe Séguin, élu eurodéputé en 1999 sur une liste conduite par Charles Pasqua, puis réélu en 2004, sur l’une des listes du MPF. Rien d’indigne ni de scandaleux dans tout cela, mais Philippe de Villiers, Charles Pasqua, Jean-Pierre Chevènement ne sont pas des fréquentations convenables, même indirectes, pour un européen fédéraliste comme toi, Jean-Luc. Peut-on jouer encore un peu, en souriant, de te voir choisir comme champion celui qui avait prédit, dans un entretien donné au journal Le Monde : « La gauche ne court pas beaucoup le risque d’être battue par la droite, mais elle peut l’être par les impôts et par les charges »[2]. Vision et constance, deux qualités nécessaires à tout homme d’Etat. Fédéraliste et révolutionnaire, Jean-Luc, mais ancien ministre et sénateur quand même !
Salut Dominique,
Quand JLM et philippe de V se sont croisés dans les couloirs du sénat alors qu'ils devaient participer à un débat ils se sont chaleureusement salués en tant que "camarades du Non". Ce n'était pas seulement anecdotique, JLM n'est pas très amical en privé avec ses adversaires politiques. Le referendum a instauré un nouveau clivage politique en France encore sous estimé mais qui éclatera en 2007. Le 29 mai 05 était un referendum sur la mondialisation, l'economie de marché dans un univers concurrentiel, et le rapport à l'alliance Atlantique.
SA
- Bonjour Sylvain ! Heureux de te lire. Je crois aussi que les élites du Non ont fusionné pendant la campagne... et qu'elles restent aujourd'hui nostalgiques de ce qui fut pour elles une période non seulement heureuse mais inespérée. Le sentiment qu'elles ont pu éprouver d'être en phase, enfin, avec ce "peuple" mythique est si fort, surtout à gauche, qu'elles refusent de reconnaître les ressorts de ce mouvement. Fustiger la mondialisation et le libéralisme en votant contre un Traité européen ne conduit guère qu'à du nationalisme.
DR
Rédigé par : sylvain attal | 29 mai 2006 à 12:14