Cela commence par une mise en scène d'une étonnante complaisance : « Promoteur du "Plan C" (écrire nous-mêmes une Constitution d'origine Citoyenne), Etienne Chouard, qui avait été l'un des animateurs du non pendant la campagne référendaire de 2005 sur la "Constitution européenne", nous livre ici sa colère.» A la suite, on trouve un texte d'Etienne Chouard contre le traité de Lisbonne. Tout au moins, c'est le point de départ d'une diatribe singulière. L'argumentation, si l'on peut dire, balance, entre poujadisme et populisme. Le texte est truffé de simplifications outrancières. Il aurait dû susciter les questions de la rédaction de Rue 89 et non une présentation directe, complaisante, pour reprendre un terme que l’on applique souvent, dans le milieu du web, à la presse traditionnelle, avec cette prétention stupéfiante de qui dénonce l’orgueil de l’autre (je me souviens d’Achille Talon, qui ne me faisait pas tellement rire, proclamant avec une immense fierté : « je suis l’homme le plus modeste du monde » !). Au fond, ce qui me préoccupe, ce n’est pas seulement l’argumentation de Chouard, mais aussi la possibilité que de tels arguments soient présentés sans susciter aucune mise en perspective de la part d’un organe de presse qui prétend dépasser le journalisme traditionnel et se montre souvent capable, mais sur d’autres sujets, d’investigation, de décryptage et de distance critique. Voici quelques passages que l'on doit donc à Etienne Chouard :
Les parlementaires violent sans vergogne le peuple qu’ils sont censés représenter.
« Les acteurs publics français –parlementaires, ministres, juges- violent sans vergogne le peuple qu’ils sont censés représenter, en lui imposant par voie parlementaire les institutions antidémocratiques qu’il vient de refuser par référendum. On se fout de nous. »
Les journalistes sont complices.
« Ce viol est rendu possible sans déclencher de révolte grâce à la complicité active des soi-disant "sentinelles du peuple": les journalistes, censés surveiller et dénoncer les abus de pouvoir, ne remplissent pas leur mission, pourtant vitale pour la démocratie, et dissimulent un coup d’Etat sous la chape de plomb d’un silence coupable. »
Les origines de la trahison remontent aux années 1930.
« En 2007, une autre découverte confirme la direction que prenait mon analyse : l’éclairage précieux des années 30, fourni par les travaux d’Annie Lacroix-Riz, permet de prouver les intrigues gravissimes des industriels et des banquiers contre les institutions républicaines et contre la démocratie. »
Les banques privées et le banquier Pompidou sont les coupables.
« L’abandon aux banques privées de la création monétaire est sans doute la source principale de nos impuissances politiques, mais, surtout, j’ai découvert un fait majeur dont aucun journaliste ne parle jamais : l’abandon définitif, scellé au plus haut niveau du droit -sans débat public-, l’abandon par les Etats de la création monétaire, au profit exclusif des banques privées ». Etienne Chouard peut ici avancer des chiffres : « Cette affaire nous coûte en France environ 80 milliards d’euros par an, une paille… et depuis 1973, date où cette interdiction a commencé en France, par la volonté du banquier Pompidou assisté par Giscard, la dette publique n’a fait que croître au point d’asphyxier l’Etat et de menacer les services publics; et le chômage suit la même pente que la dette! Je suis sûr que ce chômage est lié à cette dette. »
Ecoutez bien…
« Alors, écoutez bien: on dirait (je le dis sans avoir encore de réelle certitude sur ce point, je lis beaucoup, je progresse, mais si nous avions des débats contradictoires et publics sur tous ces points, nous progresserions tous très vite !) que toutes ces expériences, toutes, à chaque fois que les hommes reprennent le contrôle de la création monétaire et rendent la monnaie suffisante dans une région, à chaque fois, le chômage et la misère disparaissent dans les mois qui suivent, l’activité générale reprend à vive allure. Ce n’est pas tout à fait inintéressant, n’est-ce pas ? »
Ce n’est pas une théorie du complot…
« Là, je vois venir un de ces sagaces analystes qui n’ont qu’un argument, un seul, aussi léger que l’air: "Ouais, on connaît: encore un paranoïaque qui croit à la théorie du complot!" Fin de la réflexion, les neurones du sagace ont fait leur boulot, y’a plus d’argument, circulez! A l’évidence, cette "réflexion" est le degré zéro de l’argumentation. On se fout de qui ? »
... mais une découverte bouleversante pour moi...
« Le lien entre nos institutions -malhonnêtes dès leur constitution, de façon à bien verrouiller l’impuissance politique des salariés- et les intrigues des banques privées -qui sont capables, pour nous asservir, de voler la création monétaire à la collectivité, et même, comme en 1940, de contraindre les représentants politiques à livrer le pays à des bourreaux qu'elles ont fait naître de toutes pièces dans les années 30-, est pour moi la découverte bouleversante de l'année 2007. On commence à avoir des preuves que le cauchemar des banquiers, c'est que les salariés (80% de la population active) échappent à leur emprise et luttent victorieusement pour augmenter leurs salaires.»
Jean Monnet sent le souffre !
« Le même choix, le même sabordage (pour les mêmes raisons : tenir en cage les salaires), à travers la construction européenne ardemment voulue et imposée par des banquiers et des industriels, à commencer par Jean Monnet, idole des eurolâtres, mais qui sent le souffre.»
Nous sommes entre les mains d'une bande de voleurs violeurs !
Le verdict tombe : « Le coup de force de la voie parlementaire montre au grand jour que nous sommes dans les mains d’une bande de voleurs violeurs : nous sommes en cleptocratie ». La conclusion s'impose : « nous devons donc prioritairement nous réapproprier le processus
constituant pour remettre les élus sous contrôle et reprendre la
maîtrise publique de la monnaie ». Pour finir, Etienne Chouard propose une assemblée constituante désignée par tirage au sort.
Mais que fait la rédaction de Rue 89 ?
Rue 89 est assez fascinant de ce point de vue : une expérience de nouveau média en ligne qui tourne court car on se rend compte que les commentaires sont investis par des extrêmistes qui s'en servent comme défouloir.
La haine et l'antiparlementarisme qui s'y expriment sont parfaitement consternante pour un démocrate.
Peut être la rédaction est-elle influencée par ce qu'elle pense être la majorité de son lectorat ?
Notons bien qu'il s'agit ici d'une tribune : une contribution extérieure à la rédaction qui vise à donner une opinion extérieure. Elle publie aussi heureusement quelques articles plus raisonnables dans cette même rubrique, encore faut-il que des rédacteurs modérés aient envie d'être publié sur ce site compte tenu de la nature des commentaires qui s'y expriment.
Rédigé par : Valéry-Xavier Lentz | 05 février 2008 à 08:46
Ca ne vous suffit pas de tenir 95% des media traditionnels (Mosco hier au 7-9 d'Inter, suivi de Cohn Bendit ce matin, demain VGE puis Barnier ?)
Il se trouve que Maurice Allais, prix Nobel d'économie, est favorable à la nationalisation des banques, avec des arguments d'un autre niveau de sophistication mais pas forcément très éloignés, au fond.
Vous avez la victoire bien peu élégante et l'acrimonie facile.
Rédigé par : edgar | 05 février 2008 à 09:54
Etienne Chouard doit encore rêver [en secret ?] du Grand Soir et regrette l'époque du Soviet Suprême qui décide de tout et même du reste ... "au nom" du peuple...
Ah, c'est sûr c'était bien mieux mon bon monsieur, au moins nous serions vraiment libres libres libres...
Affligeant !
Et désolant de la part de Rue89 ... évidemment.
Rédigé par : Olivier | 05 février 2008 à 10:44
Edgar, c pas le même Olivier...
Rédigé par : olivier | 05 février 2008 à 11:06
Les bras m'en tombent. Il remet ça dans la déconnade le sinistre Chouard, avec son brouet idéologique sous tendu.
Ceci dit, j'ai l'impression, à voir les commentaires dans les fora, sur agoravox etc. que comme la dernière fois, comme D. Reynié l'avait pointé dans une communication au mouvement européen, le net est massivement investi par les anti européens, et du coup majoritairement anti européen. Une étude sur le sujet serait intéressante. Contrairement à ceux qui beuglent au complot médiatique ouiste, je pressens que les nonstes sont majoritaires en exposition médiatique, en France s'entend, à tout le moins sur le Net.
Rédigé par : Le Xanthien | 05 février 2008 à 12:20
Par exemple sur l'un des plus gros topic sur l'Europe (1400 pages, 55 000 contributions, 575 000 visites), on n'entend presque plus que les nonstes : http://forum.hardware.fr/hfr/Discussions/politique/europe-rome-demain-sujet_31537_1409.htm
Rédigé par : Le Xanthien | 05 février 2008 à 12:24
C'est vrai qu'il y a de tout et n'importe quoi dans ce que vous relevez du texte de Chouard.
Mais que pensez vous de sa conclusion ? Là comme ça d'instinct, une assemblée constituante européenne peut sembler une bonne idée... élue ou tirée au sort évidemment c'est pas la même chose...
Rédigé par : Colin | 05 février 2008 à 13:46
bon et alors Dominique, c'est un peu court, que répondez-vous à Etienne Chouard, argument contre argument j'entends ?
Rédigé par : koko | 05 février 2008 à 23:49
bon et alors Dominique, c'est un peu court, que répondez-vous à Etienne Chouard, argument contre argument j'entends ?
Rédigé par : koko | 05 février 2008 à 23:49
J'avais repéré assez vite que ce n'était pas le olivier censé que je connais.
Rédigé par : edgar | 06 février 2008 à 00:00
Je recopie un post d'un autre forum.
Sur le fond, je pense que Chouard manque dramatiquement de culture et d'intelligence. Et qu'il cultive une espèce de vision mécaniciste simpliste des sociétés humaines. Du coup il cherche "le" responsable et est naturellement prédisposé à gober toutes les théories du complot imaginables. Bref il manque de modestie par rapport à la complexité du monde et ne parvient du coup pas à la percevoir.
C'est un idéologue normatif égaré dans le monde réel. Et ses "découvertes" (par ailleurs fausses) ont du coup un coté savoureux par leur naïveté cocasse.
Rédigé par : Le Xanthien | 06 février 2008 à 04:50
Pour évoquer, avec Colin, le thème de l'assemblée constituante : en cas de procédure électorale, je ne vois pas pourquoi nous arriverions à un résultat très différent de ce que fut la Convention, comme type d'assemblée, et j'imagine que de tels travaux, en cas de compromis, donneraient un résultat assez proche de ceux qui fut nommée la Constitution européenne. Il faut rappeler que nous n'avons eu aucun texte alternatif au TCE. Le seul texte capable de représenter une proposition alternative est le traité de Lisbonne. On souligne souvent la grande ressemblance entre les deux textes, comme pour dénoncer une supercherie. Mais il me semble que cette ressemblance souligne au contraire l'incapacité des nonistes qui ont pu empêcher le TCE mais n'ont pas su présenter un texte de substitution. L'idée d'une assemblée constituante tirée au sort est stimulante. Mais il faut avoir le goût du risque. D'abord, pour les nonistes, de droite comme de gauche, parce que sachant que la proportion de citoyens européens ayant voté au moins une fois pour les partis d'extrême gauche ou d'extrême droite entre 1996 et 2007 est de 3,3% en faveur de l'extrême gauche et de 7,7% en faveur de l'extrême droite. Donc, grosso modo, sur le plan idéologique le tirage au sort désignerait une assemblée constituante modérée, relevant de ce vaste territoire idéologique central que je nomme l'hypercentre, avec un conservatisme populaire sans doute assez puissant (on imagine l'intérêt d'une telle assemblée pour les politiques répressives, le contrôle de l'immigration, etc.). Ensuite, il convient d'évoquer la question des compétences qui demeure une réalité résistante. Imaginer que chacun soit spontanément en possession de la compétence pour approuver ou refuser un texte, oui ; imaginer que chacun soit spontanément en possession de la compétence pour rédiger un texte, non. A cela on peut ajouter qu'une assemblée constituante transnationale supposera d'aborder la question des langues utilisées pour délibérer. Faut-il envisager un tirage au sort filtré par les compétences inguistiques ? On imagine les effets...
Rédigé par : Reynié | 06 février 2008 à 11:11
J'apprécie le commentaire un peu plus constructif de M. Reynié qui montre que l'idée d'Etienne Chouard d'une assemblée constituante par tirage au sort n'est pas si loufoque que ça, finalement.
Qu'il se penche de même sur chaque point de M. Chouard, en évitant de rentrer dans le ton de son article volontairement provocateur, et peut-être se rentra-t-il compte que l'article n'est pas si impertinent ...
La remarque vaut aussi pour tous les commentateurs qui dénigrent un peu facilement sans montrer grand chose ...
Valéry-Xavier Lentz, Olivier, Le Xanthien, Colin, Reynié, j'attends vos contre-démonstrations (certainement intelligentes, n'est-ce pas Le Xanthien ?).
Rédigé par : R.G. | 06 février 2008 à 13:16
C'est un peu facile de s'en prendre à Etienne qui radote parfois! Mais je vous ai vu hier, Monsieur Reynié, face à un autre radoteur, d'une autre dimension, sur FR3, à "C dans l'air". Devant la série d'inepties débitées par J.Marseille vous n'avez pas pipé. Comme quoi c'est plus facile de s'en prendre aux petits qu'aux gros.Alors que J.Marseille répète ses salades pratiquement tous les quinze jours depuis deux ans, le pauvre Chouard n'a aucune tribune.
Rédigé par : JM | 06 février 2008 à 22:56
Moi, je ne peux pas contester Rue89, ils m'ont interviewé et je n'ai pas encore montré la vidéo à mes parents...
:-)
N'empêche, quand je lis les propos de M. Chouard, on s'aperçoit de la proximité des idées entre extrême gauche et extrême droite.
Pour Le Xanthien,
Sachez que Touteleurope avait montré grâce à leur cartographie du net que les "pro-européens" avaient repris du terrain.
Cependant, on voit bien le savoir-faire des partisans des extrêmes pour faire des copier-coller et pour reprendre les mêmes idées. Là-dessus, il est vrai, ils sont toujours plus forts que nous, même si nous avons fait des progrès.
Rédigé par : Fabien du Taurillon | 06 février 2008 à 23:18
Bonjour Monsieur Reynié, bonjour à tous,
Je découvre à la fois votre blog et ce billet, et je vois bien que l’endroit ne sera pas pour moi un havre de paix.
Pourtant, je voudrais tenter ici la chance d’un véritable débat, même réduit à quelques points, tant il est vrai qu’on ne progresse jamais tant que dans la contradiction.
Je ne crains pas ceux qui semblent me détester (ou me mépriser) parce que je suis sûr que c’est un malentendu (et je sais aussi, naturellement, que je peux me tromper).
Je me berce peut-être d’illusions, mais je suis sûr que, passé le mouvement d’humeur bien compréhensible que vous avez pu ressentir à la lecture de mon article sur www.rue89.com, vous aurez à cœur de produire quelques arguments de fond, bien étayés, pour me contredire et prouver que je me trompe.
Je vous invite, de façon tout à fait pacifique, à en exprimer un — un argument de fond — pour commencer, et je vous promets de vous répondre loyalement et sérieusement.
Ce pourrait être à propos de la légitimité politique et économique de l’abandon de la création monétaire aux banques privées.
Nous pourrions examiner ensemble le fait que ce soit Pompidou qui ait pris le premier, en 1973, la décision (incroyable) d’interdire à l’État d’emprunter auprès de la Banque de France (c’est-à-dire la décision de l’État lui-même de renoncer à créer la monnaie dont il a besoin pour financer les investissements publics et d’emprunter (à tout jamais ?) cet argent au prix d’un intérêt ruineux) ; vous m’expliquerez que le fait que Pompidou ait été Directeur général de la banque Rothschild en 56 est une coïncidence qui ne prouve rien, mais vous m’expliquerez, s'il vous plaît, la légitimité — économique et politique — de ce « choix » (sabordage ou hara-kiri, plutôt) qui me paraît catastrophique (et que condamnent quelques grands économistes bien moins fragiles que moi).
Mais notre discussion pourrait aussi analyser la légitimité des hommes au pouvoir (parlementaires, ministres, juges) à écrire et réviser eux-mêmes la Constitution, c’est-à-dire les règles et limites de leur propre pouvoir. Le conflit d’intérêt me paraît à la fois évident et grave ; j’aimerais bien connaître les reproches que vous faites à mon analyse sur ce point absolument décisif pour l’organisation de la Cité et pour la concorde.
Nous pourrions revoir ensemble à quoi sert une Constitution — manifestement, cela ne va pas de soi et cette question centrale (très concrète) mérite un débat sérieux, avec un peu de temps pour développer, n’est-ce pas ? — et nous pourrions chercher si « le droit du droit » (la Constitution) est, à vos yeux, un outil pour les puissants, un outil pour les élus, ou un outil pour le peuple pour se protéger contre les abus de pouvoir.
Nous pourrions étudier la situation de la ratification par voie parlementaire du traité de Lisbonne — sur lequel j’ai pas mal travaillé, moins que sur le TCE, il est vrai, mais VGE m’a rapidement dissuadé en avouant TOUT dans Le Monde du 26 octobre 2007 — qui est manifestement une copie maquillée du « traité constitutionnel » (je déteste cet oxymore que j’analyse comme un aveu d’abus de pouvoir) rejeté par référendum, et voir ensemble ce qu’il y a de choquant ou d’exagéré à parler de « viol », c’est-à-dire « acte délibéré de violence contre la volonté de quelqu’un ».
Nous pourrions examiner ensemble le rôle actif des journalistes — anciennes « sentinelles du peuple » transformées en « carpes serviles et discrètes » par le jeu de l’appropriation des médias par les plus puissants, du salariat, de la précarité et du chômage combinés — dans l’absence totale de révolte populaire contre ce « coup d’État simplifié » (l’expression est pertinente ; elle est de Nicolas Dupont-Aignan). Si vous avez lu, depuis ces derniers mois, de l’information sur les projets institutionnels de l’exécutif et des invitations au débat contradictoire à des heures de grande écoute, je vous serais reconnaissant de me signaler où. Avez-vous eu l’impression qu’une bonne publicité ait été donnée aux opinions dissidentes (comme l’exigent les principes les plus élémentaires de la démocratie) ? Avez-vous remarqué une quelconque mise en scène des conflits ? À quoi servent les journalistes, à votre avis ?
Nous pourrions tout autant évoquer les travaux de l’historienne Annie Lacroix-Riz et l’influence des banquiers (positive ? épouvantable ? inexistante ?) sur la politique des pays, depuis fort longtemps et jusqu’à la récente construction européenne si ardemment défendue par le banquier Jean Monnet. Ceci est vraiment passionnant, j’ai hâte de vous lire.
Il y a peut-être d’autres points qui vous semblent importants et que j’oublie ce soir : je vous laisse choisir.
Après avoir admiré l’actualité de la démocratie athénienne décrite par Hansen, Manin, Finley, de Romilly…, je lis Hobbes, je travaille Montesquieu, j’épluche Benjamin Constant, je savoure Tocqueville, et je retrouve chez tous ces hommes passionnants une obsession (libérale ?) — que je partage profondément — de la crainte de l’État Léviathan et de la très nécessaire séparation des pouvoirs pour les limiter. Je lis plusieurs livres d’Orwell de front, je dévore Castoriadis, et je cherche avec Alain et Simone Weil comment affaiblir et contrôler les pouvoirs, y compris médiatiques, manifestement si faciles à acheter…
Je suis sûr que nos lectures de ces auteurs différent, c’est normal, mais je suis sûr également que ces différences sont de nature à nous enrichir, si nous faisons chacun le pari que « l’autre » ne se trompe pas sur tout et peut même sûrement nous aider à progresser, malgré certaines (graves) erreurs par ailleurs.
Je vous promets aussi de vous rendre les armes sur le point que vous aurez choisi si vous êtes le plus fort, si vos arguments sont plus justes que les miens.
Et si cela vous semble (un peu) constructif, nous pourrions ensuite envisager un autre point.
Nous pourrions prendre l’engagement mutuel d’éviter les noms d’oiseau peu aimables qui viennent souvent à l’esprit quand on est échauffé et qui sont assez contre-productifs dans un débat, si vous voulez bien.
Je considère que les électeurs « nonistes » et « ouiistes » sont tous de bonne foi (en excluant cependant les très riches et leurs politiciens de service qui ont manifestement pensé et imposé l’Union européenne pour protéger leurs privilèges), et que la plupart de leurs querelles reposent sur des malentendus : nous voulons tous (sans doute) une Europe apaisée et prospère (heureuse ?), mais nous n’avons manifestement pas les mêmes peurs.
Peut-être des ouiistes vont-ils ici parler à des nonistes sans s’empailler ? On verra.
J’espère ne pas vous importuner par cette invitation (qui n’est pas facile à formuler, vous vous en doutez, car je sais bien que je risque ici de prendre des coups, pas forcément justes ; mais je veux vous faire confiance pour rendre possible l’échange) et je reviendrai bientôt chercher ici votre réponse.
Au plaisir de vous lire :o)
Étienne Chouard.
http://etienne.chouard.free.fr/Europe
[email protected]
PS : à mon sens, le mot « populisme » n’est pas du tout une injure. Il faudrait donc, sans doute, définir ce mot pour éviter les malentendus. Pour information, je rappelle que, pour ma part, je ne brigue rigoureusement aucun pouvoir, autre que l’élémentaire et indispensable « isègoria », ce qui n’est déjà pas si mal en cette époque de normalisation médiatique.
Rédigé par : Étienne Chouard | 08 février 2008 à 01:01
Quelle patience tu as Etienne pour te justifier aux yeux de ces censeurs à la solde de leurs maîtres tous grands patrons du Cac 40...et de leur larbins comme ce D. Reynié...Ils n'en méritent pas tant. Ne perd pas ton temps qui nous est précieux avec eux. Le 4 février 2008 restera dans l'histoire comme le jour de la plus grande forfaiture jamais commise contre les français...tout ceci dans le silence absolu...
Rédigé par : Spinnaker | 08 février 2008 à 09:35
Merci de ne pas prendre en considération le message précédent de type troll.
Je fais partie des nombreux lecteurs d'Etienne Chouard qui s'intéresse aux thèses qu'il défend et de leur mise en perspective avec leurs contradicteurs.
Son échange avec Bernard Guetta lors du référendum de 2005 était particulièrement éclairant et permettait à chacun de se faire sa propre opinion.
J'espère qu'un autre débat de cette qualité pourra naître et que les perturbateurs en tout genre -de quelqu'obédience qu'ils se revendiquent- seront ignorés.
Rédigé par : Tobeor | 08 février 2008 à 10:21
Ce débat promet d'être intéressant... qu'avez-vous donc comme arguments à avancer, Monsieur Reynié.
Oh, bien sur, je connais vos analyses fallacieuses du TCE qui a l'époque m'avaient faites bondir (vous étiez acculé dans les cordes). J'espère qu'ici, puisque "vous" avez gagné (contre le peuple, puisqu'il s'agit du même traité à peu de choses près), vous serez moins impartial: c'est la moindre des choses qu'on puisse attendre d'un prof!
Je précise que je suis pro européen, mais pas de cette Europe que "vous "pronez: une Europe,avec la même monnaie, les mêmes régles fiscales et sociales, qui sache, lorsque nécessaire, non pas fermer ses frontières, mais se protéger un minimum ( préférence communautaire)
Rédigé par : Stilgard | 08 février 2008 à 11:32
Effectivement monsieur Reynié, je trouve étrange cette méthode qui consiste à présenter des passages du discours de Mr Chouard en disant "vous voyez, regardez comme c'est hallucinant, comment rue89 peut il publier cela" comme si c'était évident pour tout le monde alors que vous n'apportez strictement aucun argument pour expliquer votre position ou vos affirmations. Non ce n'est pas évident pour tout le monde loin de là.
Rédigé par : Sandy | 08 février 2008 à 12:13
Je relève (M. Reynié)
" Mais il me semble que cette ressemblance souligne au contraire l'incapacité des nonistes qui ont pu empêcher le TCE mais n'ont pas su présenter un texte de substitution. "
Je vous retourne la question: y a t'il eu la moindre volonté politique de reprendre ce TCE alors que chacun savait bien la dizaine de points "d'accrochage" dans le projet initial, en particulier ceux que signale E. Chouard, auquel je rajouterais l'orientation ordolibérale qui apparait mieux dans la version en langue allemande (Soziale Marktwirtschaft dont la traduction par "économie sociale de marché" est un faux-ami).
Mais bon, je me demande pourquoi encore débattre puisque les "ouistes" ont gagné, tout en creusant, à mon humble avis et à mon grand regret, la tombe de l'Union Européenne: il faudra rebatir autre chose quand les peuples en auront assez que des fonctionnaires (ceux de la commission) gouvernent ou que des unanimités n'arrivent pas à se mettre en place sur les points importants (déjà cité dans mon précédent post, à savoir imposition et politique sociale)
Rédigé par : Stilgard | 08 février 2008 à 14:39
Bonjour Etienne Chouard,
Je vous remercie pour votre message. Je veux dire d'abord que je ne vois pas pourquoi vous seriez exposé sur ce blog à quoi que ce soit de désagréable, et encore moins à du mépris (où ce sentiment, à mes yeux inutile, s'exprime-t-il sur ce blog ?) ou à une forme d'agression. Je vous réponds en revanche, sur ce point précis, que votre papier publié sur Rue89 contenait bon nombre de formules authentiquement agressives (par exemple traiter les parlementaires de "violeurs voleurs" n'est pas un exemple de dialogue respectueux et je suis certain que vous n'avez jamais lu un tel registre chez les excellents auteurs que vous citez. Je veux bien tenter une discussion, mais comme vous le savez, cela suppose quelques règles sur la manière de discuter. Je crois que nous devons les uns et les autres choisir le registre de l'argumentation et non celui du pamphlet. Le pamphlet ne me gêne pas et je peux y recourir moi-même, simplement, comme vous le savez, on peut répondre au pamphlet par un autre pamphlet, mais on ne peut guère contester ou réfuter ou même discuter les énoncés d'un pamphlet où le style -impétueux, imprécateur, etc.- compte autant sinon plus que les idées défendues : c'est plus une posture qu'une position. Encore une fois, non seulement je n'ai rien contre les pamphlets mais plus encore je les crois nécessaires pour animer une controverse, mettre en tension des points de vue. Pour reprendre l'exemple des parlementaires "violeurs voleurs", comment voulez-vous que je vois dans cet énoncé invraisemblable un quelconque argument réfutable ? Dois-je prouver que les parlementaires n'ont ni violé ni volé ou bien dois-je comprendre qu'il s'agit d'une image ? mais dans ce cas, que signifie-t-elle précisément? il est impossible de le deviner. Vous le savez, en reprenant votre texte, je pourrais multiplier les exemples de ce type. Vous faites valoir dans votre message quelques principes auxquels vous êtes attaché et quelques lectures qui comptent pour vous. J'apprécie cette démarche, bien plus éclairante. Je me propose de préparer à mon tour un commentaire ou un post pour vous dire à mon tour quels sont les principes, les préoccupations, les enjeux qui soutendent mon intérêt pour l'idée européenne. Cordialement à vous.
Rédigé par : Reynié | 08 février 2008 à 19:49
Bonjour Tobeor,
je suis d'accord avec vous pour ne pas accorder d'attention aux messages injurieux ou dénués de tout raisonnement. Je note ainsi que l'on évoque la victoire des "ouistes" depuis la ratification du traité de lisbonne par le parlement. Or, c'est au moins mon point de vue, les "ouistes" ont bel et bien perdu en 2005. L'intérêt pour moi était alors double : un ensemble de réformes permettant à l'Europe un gain d'efficacité et peut-être de puissance ; la prétention constitutionnelle qui relançait enfin l'ambition politique perdue. Le traité de Lisbonne ne remplit que partiellement la première fonction et renonce à la seconde. Pour moi, ce ne peut pas être une victoire. J'ai publié ici un post pour donner un point de vue sur le nouveau traité et je l'ai intitulé précisément "progrès institutionnels et deuil constitutionnel". Merci pour votre message, à bientôt.
Cordialement à vous.
Rédigé par : Reynié | 08 février 2008 à 19:56
Bonsoir Monsieur Reynié.
Nous sommes apparemment d’accord sur un premier point : nous devons tous disposer de plusieurs registres de langage, et celui du pamphlet n’est pas du tout celui du débat interpersonnel. OK.
Comme vous le suggérez, le pamphlet permet de hurler une colère, et ce style a probablement quelques vertus thérapeutiques :o) C’est le ton de plusieurs de mes tribunes, depuis quelques années. J’en ai besoin et ça ne fait de mal à personne. N’oublions pas que je ne suis rien, ou pas grand-chose.
Mais sur l’essentiel, sur le fond, je me sens fort.
Peut-être à tort, je le sais, et c’est précisément ce risque d’erreur, toujours possible, qui est la raison de mon geste vers vous : pouvez-vous prouver, je dis bien « prouver », que je me trompe sur le fond, sur un point ou sur un autre ?
Je vous le demande parce que, depuis trois ans, comme je le fais ce soir, je n’ai pas fui le débat et j’ai croisé le fer avec de nombreuses personnes qui semblaient m’en vouloir profondément pour un « crime de la pensée » qui leur semblait insupportable. Et bien, depuis trois ans d’échanges, personne ne m’a encore démontré que j’ai tort sur le fond. Pour l’instant, j’estime donc que les partisans des « traités constitutionnels » n’ont simplement aucun argument sérieux pour nous contredire : le seul discours qu’ils arrivent à mobiliser est À CÔTÉ, hors sujet.
C’est d’ailleurs pour cela qu’ils sont conduits à nous violer, puisqu’ils n’arriveront jamais à nous convaincre sans arguments.
Comme je l’ai souvent dit, j’ai trouvé le livre de Strauss Kahn intéressant et correct, MAIS *il ne répondait pas* aux inquiétudes graves, gravissimes, que soulevait Fabius. Et ce dialogue de sourds n’a pas cessé depuis. (Certes, « il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre », n’est-ce pas ? Chacun dit cela de l’autre.)
Alors je vous demande surtout de ne pas me préparer une nouvelle mouture de vos convictions sur « l’Europe qu’il nous faut » : je la connais, je l’ai entendue mille et mille fois depuis des années, ad nauseam sur toutes les chaînes — et toujours sans contradicteur véritable, c’est à noter. Ne le prenez pas en mauvaise part : je vous parle franchement, mais sans mépris. Je connais votre pensée, je la lis, je ne la trouve pas mauvaise, malgré ses biais, je comprends sa logique, mais entendez-moi : elle ne me rassure pas.
Elle nous laisse tous profondément inquiets parce que vous ne démontrez pas du tout l’absence des problèmes graves que nous constatons et que nous dénonçons : confusion des pouvoirs, dépendance des juges, lois sans parlement, irresponsabilité des acteurs, révisions « simplifiées » sans référendum, impuissance citoyenne et puissance des lobbies, double hara-kiri monétaire qui institutionnalise le chômage et qui ruine les États en les contraignant à une dette endémique, etc.
Ouiistes et nonistes n’arrivent pas à parler de la même chose, comme si les ouiistes, sachant qu’un viol va bientôt tout régler, fuyaient l’échange perdu d’avance.
Ce que j’attends de vous, — (vous qui dites dans votre billet qu’une rédaction de journal comme les autres aurait dû me censurer au lieu de publier mon article irresponsable) —, si vous voulez bien, ce que j’attends de vous, c’est que vous me prouviez — ne serait-ce que sur un point pour commencer — que j’ai tort sur le fond.
Car enfin, s’il fallait me censurer, c’est que je devais avoir sacrément tort sur tout, n’est-ce pas ? Vous ne rencontrerez donc pas de difficultés pour établir au moins une mes erreurs.
--------------------------------
Je note votre premier reproche qui serait celui de l’exagération, et de la violence du propos.
C’est une blague ?
Qui exagère, Monsieur Reynié ?
Qui est violent ?
La victime qui mord et qui griffe en se débattant, en criant « Non ! » ?
Ou le violeur qui abuse de sa victime, ligotée et bâillonnée ?
Pas besoin d’en dire beaucoup plus, il me semble.
Quand je parle de viol, je n’exagère nullement : je dis la vérité toute nue, sans fard ; je dis ce que je ressens et ce que ressentent mes proches : nous nous faisons violenter par ceux-là mêmes qui sont (grassement) payés pour nous défendre !
Et je pourrais facilement utiliser d’autres injures (j’ai aussi un registre pas mal en la matière, je m’en servirai peut-être un jour :o)) pour dire ma haine contre ceux qui me livrent aux exploiteurs au lieu de me protéger.
Alors, Monsieur Reynié, quel est le juste enchaînement des causalités ?
Qui est violent dans l’affaire du « déficit démocratique » — (manifestement, ceux qui ont imaginé l’Union européenne ont lu Orwell : ils savent l’importance des mots pour mentir impunément) — « déficit » imposé par voie parlementaire contre la voie référendaire ?
Reprocher à la victime sa violence à se débattre, cela a quelque chose d’indécent.
Surtout quand elle est encore ficelée et muselée, et qu’on l’entend à peine marmonner à travers le bâillon.
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J’ai hâte de vous lire et de découvrir mes erreurs sur le fond. Je vais progresser.
Mais je vous relis une dernière fois, et j’ai peur d’une méprise : je vous l’ai dit, ne me récitez pas le catéchisme eurolâtre, s’il vous plaît : tout le monde le connaît par cœur, maintenant. N’ayez crainte, je suis profondément Européen, comme vous je pense, peut-être plus ? J’aime les Anglais, j’aime les Allemands, j’aime les Espagnols, etc. J’aime aussi les Africains, les Américains et les Chinois … Rien d’important ne nous sépare en fait, et dans l’opulence, nous n’aurions pas de peine à fraterniser ; ceci est important : dans l’opulence (or, les exploiteurs entretiennent savamment la rareté qui leur permet de bien vivre sans travailler). En fait, j’aime la terre entière, que ce soit clair.
Mais je déteste les abus de pouvoir et l’injustice.
Alors ça oui.
Et les abus de pouvoir sont programmés, Monsieur, voilà ce que je crois : les abus de pouvoir sont rendus possibles par des institutions qui les empêchent mal.
Et c’est le cas des institutions européennes, et je prétends que leurs vices antidémocratiques (qui y pullulent partout comme des métastases) sont directement lié à la malhonnêteté (prévisible) des AUTEURS de ces institutions — tous ces ministres, assistés de tous ces juges, rendus dociles par une carrière bien maîtrisée tous les six ans —, auteurs constituants qui ont manifestement écrit des règles pour eux-mêmes.
L’important, ce n’est pas qui vote la Constitution, l’important, c’est qui l’écrit.
Ceux qui écrivent le règles du pouvoir ne doivent pas les écrire pour eux-mêmes.
C’est pourtant précisément le cas en France et en Europe.
J’aimerais connaître votre avis sur cette thèse, qui est la mienne depuis trois ans.
Pardon d’être trop long.
Au plaisir de vous lire.
Étienne.
Rédigé par : Étienne Chouard | 08 février 2008 à 23:31
Hum, la nuit passée, je me relis et je me corrige : j'ai parlé de litanie, de catéchisme répété ad nauseam... Ce n'est pas civil. On avait dit qu'on évitait cela. Je vous demande pardon.
Il aurait suffit de dire que je connais bien vos positions, qui ont pu être développées et diffusées correctement — par vous et par ceux qui pensent la même chose que vous et qui maîtrisent la plupart des médias importants —, et que j’ai plutôt besoin d'explications en retour de mes propres inquiétudes, qui ne sont pas les mêmes que les vôtres : et c'est le point difficile, la pierre d’achoppement de ce débat essentiel qui n'a jamais pu commencer.
Étienne.
Rédigé par : Étienne Chouard | 09 février 2008 à 07:29
Hum, la nuit passée, je me relis et je me corrige : j'ai parlé de litanie, de catéchisme répété ad nauseam... Ce n'est pas civil. On avait dit qu'on évitait cela. Je vous demande pardon.
Il aurait suffit de dire que je connais bien vos positions, qui ont pu être développées et diffusées correctement — par vous et par ceux qui pensent la même chose que vous et qui maîtrisent la plupart des médias importants —, et que j’ai plutôt besoin d'explications en retour de mes propres inquiétudes, qui ne sont pas les mêmes que les vôtres : et c'est le point difficile, la pierre d’achoppement de ce débat essentiel qui n'a jamais pu commencer.
Étienne.
Rédigé par : Étienne Chouard | 09 février 2008 à 07:32
Hum, la nuit passée, je me relis et je me corrige : j'ai parlé de litanie, de catéchisme répété ad nauseam... Ce n'est pas civil. On avait dit qu'on évitait cela. Je vous demande pardon.
Il aurait suffit de dire que je connais bien vos positions, qui ont pu être développées et diffusées correctement — par vous et par ceux qui pensent la même chose que vous et qui maîtrisent la plupart des médias importants —, et que j’ai plutôt besoin d'explications en retour de mes propres inquiétudes, qui ne sont pas les mêmes que les vôtres : et c'est le point difficile, la pierre d’achoppement de ce débat essentiel qui n'a jamais pu commencer.
Étienne.
Rédigé par : Étienne Chouard | 09 février 2008 à 08:12
Etienne,
Tu n'as pas à demander pardon. Pas à cet homme-là.
Ne te laisse pas détruire. Ce genre de personnage vit de cela.
Rédigé par : olivier | 09 février 2008 à 12:26
Bonsoir Etienne Chouard,
Un grand merci pour ce message. Peut-être serez vous d'accord pour poser le fait que parmi les questions compliquées que l'on se pose, il y a celles qui touchent à l'objet même de la controverse et aux raisons de l'animosité qu'une différence de points de vue peut faire surgir. Ainsi, s'agit-il, pour vous et moi, de s'en prendre à quelqu'un, à une catégorie de personnes, ou s'agit-il de s'en prendre à une interprétation, c'est-à-dire d'un désaccord sur la manière de comprendre ce qui se passe et sur les conclusions puis les conséquences que l'on peut en tirer ? Par principe, j'espère ne pas y avoir trop souvent dérogé, je n'approuve pas la démarche posant, plus ou moins explicitement, la méchanceté de l'interlocuteur. Par exemple, je veux supposer que vous-même, malgré nos points de désaccord, y compris sur le choix des registres, vous défendez sincèrement votre point de vue, que vous êtes favorable au progrès humain, à la vérité et, bien sûr, à la discussion. Si l'on pose, ou si l'on laisse entendre, comme parfois il suffit de le faire, que celui qui n'est simplement pas d'accord avec vous est un être méchant, vendu aux puissants, rêvant de tyrannie et d'opulence, sans morale, jouissant d'exploiter les plus faibles, etc., alors cela n'est plus un débat et l'on passe, en songeant à Orwell et Koestler, à l'un de ces procès dont la condamnation est écrite d'avance. Je ne parle pas de manière étroite. Je ne parle pas de vous ou de moi, je parle de la causalité retenue par vous ou par moi dans l'analyse de la situation : si l'Europe tourne mal parce que des hommes méchants président à sa destinée et oeuvrent pour leur profit personnel sans aucun souci pour le malheur qu'ils provoquent chez tous les autres, dans ce cas, la seule solution est une guerre civile pour jeter en prison les malfrats, peut-être les découper en morceaux, avant de les remplacer par d'honnêtes citoyens. Dans ce cas, il faut écrire une nouvelle version de "Que faire ?", mais la discussion n'a plus beaucoup de sens. C'est pourquoi je propose de reconnaître comme une règle nécessaire à la discussion intellectuelle de laisser de côté l'hypothèse de la méchanceté des personnes. J'ajoute enfin qu'une telle hypothèse est désagréable parce qu'elle implique que celui qui l'énconce affirme par là même sa propre vertu, autoproclame sa bonté, son humanisme, etc., si l'on veut bien admettre que le méchant, le menteur, c'est toujours un autre que soi-même. Cordialement.
Rédigé par : Reynié | 09 février 2008 à 19:03
Monsieur Reynié, j'ai l'impression que vous tournez autour du pot.
Il me semble que la question n'est pas tant de savoir si les dirigeants sont "tous pourris", mais de savoir, dans ce débat que vous avez initié en "attaquant" Etienne Chouard (du moins ses écrits sur rue89), s'il dit de très grosses bétises.
Prenez par exemple - pour en débattre - le cas des affirmations concernant le l'interdiction faite à l'Etat (interdiction faite, comme par hasard, par un ancien banquier) d'emprunter auprès de sa banque nationale (propriété de la collectivité), alors même que les banques privées jouissent, elles, de ce privilège. De plus, la collectivité (nous) ne peut plus créer alors que ces mêmes sociétés privées (dont je ne nie pas le savoir faire) le peuvent.. et elles peuvent aussi directement ou indirectement, prêter à cette même collectivité avec intérêts alors que leur travail consiste à écrire quelques lignes sur un ordinateur! Et tout cela confirmé par l'article 123 du nouveau Traité de Lisbonne. Rien que ce point m'aurait fait voter non à un référendum.
Ces interêts qui nous coûtent collectivement plus de 40 Md€ par an et sont autant de monnaie que nous ne pourrons pas investir dans les équipements publics dont nous avons besoin!!!
Rédigé par : Stilgard | 09 février 2008 à 20:00
Bonsoir Stilgard,
tout le monde prend "en exemple" cet article 123 du traité de Lisbonne, comme si tous avaient été lus. Les citations de l'article "123" diffèrent beaucoup et sont souvent tronquées. Pour être certain de parler du même texte, pouvez-vous svp me fournir un lien vers la version du traité de Lisbonne que vous utilisez (avec l'article 123 in extenso). D'avance je vous en remercie. Cordialement.
Rédigé par : Reynié | 09 février 2008 à 21:53
Tiré de http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i0439.pdf
RAPPORT D’INFORMATION
PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
sur les modifications apportées par le traité de Lisbonne au traité sur l’Union européenne et au
traité instituant la Communauté européenne,
"Article 123
1. Il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États
membres, ci-après dénommées "banques centrales nationales", d'accorder des découverts
ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux
administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités
publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres ; l'acquisition
directe, auprès d'eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales
nationales, des instruments de leur dette est également interdite.
2. Le paragraphe 1 ne s'applique pas aux établissements publics de crédit qui, dans le
cadre de la mise à disposition de liquidités par les banques centrales, bénéficient, de la
part des banques centrales nationales et de la Banque centrale européenne, du même
traitement que les établissements privés de crédit."
Et maintenant : pourriez-vous, s'il vous plait (au sens premier de l'expression) expliquer ce que, pour vous, signifie cette interdiction et pour quelle raison elle a été mise en place.
Rédigé par : Nouche | 10 février 2008 à 00:57
http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/
rap-info/i0439.pdf
Rédigé par : Nouche | 10 février 2008 à 01:01
Bonsoir Dominique Reynié (c’est étrange de s’appeler comme ça, non ?),
Nous sommes d’accord : évitons tout procès d’intention et soyons convaincus de notre bonne foi respective.
Quant à la présomption d’innocence à laquelle ont droit aussi les banquiers et les industriels, comprenez-moi : je n’ai pas d’a priori (que je sache) ; c’est progressivement, et non pas d’emblée, que j’en suis venu à suspecter les industriels et les banquiers (« les méchants »), en cherchant à qui profite le crime, ce forfait que je constate à tout propos contre la démocratie, quand je lis les institutions européennes. Idem pour nos élus dont j’ai découvert progressivement qu’ils nous livrent à des exploiteurs en pleurant qu’ils nous aiment.
J’arrête ; on a dit « pas de procès d’intention ».
Il me semble pourtant, pour avoir déjà longuement pensé la question, qu’après nos premiers échanges, le faisceau d’indices graves, précis et concordants deviendra si troublant que les conjectures sur les malhonnêtetés probables viendront d’elles-mêmes à l’esprit, tout comme cela m’est arrivé ces derniers mois.
Mais nous verrons. Vous avez raison : commençons par jauger le droit et les faits, d’accord.
Par quel point voulez-vous commencer ? Si je peux me permettre une suggestion, il serait intéressant de préciser d’abord « à quoi sert une Constitution ? »
Est-ce que je me trompe tant, quand je dis qu’une Constitution sert à affaiblir les pouvoirs, à les limiter, pour interdire tous les abus de pouvoir ?
N’est-ce pas précisément le sens de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, quand il annonce haut et fort qu’une société qui ne garantit pas la séparation des pouvoirs n’a pas de constitution, c’est-à-dire est exposée au despotisme ?
Est-ce que je me trompe quand je dis qu’une Constitution est absolument nécessaire pour nous protéger tous contre les abus de pouvoirs ***dès lors que*** sont institués des organes créateurs de normes obligatoires (car ce sont ces normes, précisément, qui peuvent nous nuire), ***et sans attendre que*** les auteurs de ces organes qualifient ou pas de « Constitution » les textes fondateurs ?
Considérez-vous qu’il est possible pour l’inventeur d’organes normatifs (comme les Ministres qui ont imaginé l’UE) de déqualifier son texte (de refuser de l’appeler « Constitution », et d’insister sur un autre aspect pour l’appeler… par exemple, « traité »…) pour se dédouaner des grands principes protecteurs nécessaires au plus haut niveau du droit ? Si c’était le cas, la protection du concept de Constitution deviendrait toute théorique, non ?
La situation serait trop facile pour un tyran, non ? Il lui suffirait de mettre en place tout l’appareil nécessaire pour opprimer tranquillement, mais sans jamais utiliser le mot Constitution… Et nous n’aurions rien à dire ? Allons… Je suis sûr que vous me comprenez.
Comprenez-vous ce que je veux dire quand je dis que les traités instituant l’Union européenne sont des Constitutions DE FAIT ? Par le simple fait qu’elles mettent en place des organes dangereux, il faut leur appliquer tout ce qu’on sait (depuis 2 500 ans) de la protection contre les abus de pouvoir : séparation des pouvoirs, contre-pouvoirs, rotation des charges, reddition des comptes, indépendance des magistrats, souveraineté monétaire, protection des opinions dissidentes grâce à l’isègoria, pouvoir réel donné aux initiatives citoyennes, mise en scène des conflits dans un Parlement, etc.
Nous pourrions ensuite approfondir un peu la séparation des pouvoirs dans les institutions européennes ; ça promet.
Au plaisir de vous lire.
Étienne.
PS : pardonnez-moi de vous rejoindre si tard : je viens de rédiger quelques réponses circonstanciées au long de l’article qui vous a fait réagir (sur rue89).
Rédigé par : Étienne Chouard | 10 février 2008 à 04:40
M. Chouard,
Je suis effaré de vous voir partir du postulat "les députés sont des violeurs parce qu'ils complotent contre le peuple".
C'est effrayant. Vous êtes de mon point de vue totalement dans le dogmatisme des extrêmes : l'élite contre le peuple (la théorie du viol) dans une théorie du complot international (la théorie des collusions banquiers-industriels-pouvoir en place), un système mondial qui est néo-libéral (comme si le capitalisme ne pouvait être régulé), si on est pas d'accord avec vous on fait parti du complot (catéchisme eurolâtre).
Au moins, on ne peut qu'être que binaire : votre vie est plus simple puisqu'on est soit gentil et d'accord avec vous, soit un ami des méchants.
Rédigé par : Fabien | 10 février 2008 à 10:31
"La haine et l'antiparlementarisme qui s'y expriment sont parfaitement consternante pour un démocrate." (V.-X. Lentz)
"Etienne Chouard doit encore rêver [en secret ?] du Grand Soir et regrette l'époque du Soviet Suprême qui décide de tout et même du reste ... "au nom" du peuple..." (Olivier)
Vous ne savez pas de quoi vous parlez. É. Chouard est assurément démocrate ; quant au Parlement, il en fait évidemment l'unique dépositaire de la souveraineté du peuple, à la condition parfaitement démocratique qu'il ne s'oppose pas aux volontés expresses du peuples, qu'elles soient exprimées au travers de réponses ou de questions, d'ailleurs.
"j'ai l'impression [...] que [...] le net est massivement investi par les anti européens, et du coup majoritairement anti européen".
Quant on commence par assimiler l'Union européenne à l'Europe, on tue tout débat sur ce que veulent les gens. Je vous interdit de me qualifier d'anti européen. Nul n'ignore que l'immense majorité des citoyens dans presque tous les pays de l'UE, sont favorables à une Europe politique. Beaucoup ignorent tout, par contre, de ce qu'ils entendent pas là. Car personne ne leur a demandé si par leur volonté massive d'une constitution européenne, ils n'entendrait pas par exemple, une vraie constitution, pour ne pas parler d'une vraie démocratie européenne. Donc une République fédérale d'Europe...
Rédigé par : samium | 10 février 2008 à 12:04
@ Fabien,
Le viol du peuple par ses propres représentants n'est pas du tout un postulat (fixé à l'avance, donc), mais bien un constat (dicté par une rigoureuse observation des faits), et pas seulement en France.
Je me soumets à l'évidence empirique.
Et je lis en détail les institutions que j’évalue. Je ne parle pas de démocratie sans lire la Constitution et sans examiner son fonctionnement réel. Je ne me paie pas de mots comme ceux qui présentent l’Union européenne comme « garantissant les plus hauts standards de la démocratie » sans avoir même lu le TCE ou le Traité de Lisbonne (illisibles, il est vrai).
Vous voudriez bien que j’aie établi mes conclusions actuelles ***avant*** de commencer à travailler, ça vous arrangerait pour me discréditer, mais les choses ne se sont pas du tout passées comme ça : j’étais en 2004, comme vous, favorable aux institutions européennes (sans les connaître, tout pétri de confiance pour mes représentants, notamment « socialistes », et occupé à mon travail et au vol libre…), et ce sont des milliers d’heures de travail et de débat qui m’ont conduit progressivement aux conclusions que vous découvrez aujourd’hui (ce n’est pas de ma faute si vous commencez par la fin) et que vous prenez à tort comme des a priori.
Vous vous méprenez donc profondément en me faisant un procès d’intention qui vous empêche apparemment de me lire normalement.
Il n'est pas question d'une "théorie" du viol, mais bien de déplorer une violence **effective et incontestable**, sauf à être de la plus évidente mauvaise foi.
Il n'est pas question de bâtir une « théorie » « des » complots internationaux, mais d'examiner ***les preuves***, qui existent par milliers dans les archives de police, dans les registres des préfectures, dans les rapports de RG, etc., et dont vos étonnantes oeillères vous empêchent d'envisager même la possibilité : je n'ai évidemment pas de certitude établie pour toujours, mais je suis consterné par le corpus des preuves qu'accumule l'historienne Annie Lacroix-Riz sur ce sujet.
Je vous recommande ses quatre derniers livres qui sont tout simplement bouleversants : « Industriels et banquiers sous l’occupation – La collaboration économique avec le Reich et Vichy », « Le choix de la défaite », « L’histoire contemporaine sous influence » et « L’intégration européenne de la France – La tutelle de l’Allemagne et des États-Unis ».
Je ne sais pas quel est votre propre apport — indigné effaré effrayé que vous êtes —, en matière de **pièces à conviction** pour établir votre surprenante certitude qu’il n’existe aucun complot nulle part. J'attends de voir ces pièces avant de vous suivre plus avant.
Vous me trouvez « binaire » alors que je passe ma vie à découvrir, détailler et respecter les infinies nuances du réel et de mes contradicteurs, tout en condamnant de plus en plus radicalement —c’est bien vrai mais faut-il le déplorer — la violence imposée toujours et partout par les privilégiés sur la multitude pour conserver leurs privilèges, cette violence étant, elle, relativement « binaire ».
Lisez Lacroix-Riz, Alain, Allais (Maurice) et Stiglitz, comme je lis Furet, Marseille, Smith, Bastiat et même l’affreux Joseph de Maistre, par exemple, si vous avez la possibilité intellectuelle (et le goût) de chercher dans l’adversaire (jamais définitif) des sources de progrès personnel (tout en nuances, justement).
C’est tout le mal que je vous souhaite :o)
Étienne.
Rédigé par : Étienne Chouard | 10 février 2008 à 12:10
Merci Nouche, c'est exactement cela...
Rédigé par : Stilgard | 10 février 2008 à 12:46
A Reynié
"Pour évoquer, avec Colin, le thème de l'assemblée constituante ..."
Si vous connaissez un minimum le fonctionnement de l'actuelle Union européenne, ce dont je ne doute pas, vous n'aurez pas manqué de constater ces deux caractéristiques majeures :
1. les élus, tous les élus, y sont intégralement privés du droit d'initiative, dans tous les domaines : de l'élaboration des directives à celle des traités, en passant par la nomination de la commission (pour le reste, ils sont purement écartés).
2. l'UE est une confédération d'États (travestie, certes, avec un PE élu au suffrage universel direct, mais pour la raison que je viens de noter, ça ne vaut rien, tandis que ce leurre est pratique pour justifier des transferts de souveraineté au plan européen).
Si vous ne tenez pas compte de ces deux traits majeurs, vous ne pouvez pas percevoir l'évolution flagrante qu'apporterait le résultat d'une constituante, mandatée par des peuples, par rapport à celui d'une convention mandatée par des gouvernements.
Le "compromis" pourrait déjà être cherché sur la forme juridique de l'Europe. Etant par définition constitutionnelle, dans cette voie, je mange mon chapeau si elle ne change pas radicalement... Pour commencer, vu le mode, il n'y a pas de raison de penser que les institutions établies alors reposeraient sur des traités... Pourquoi donc, alors, reporter les pouvoirs des principaux souverains actuels, les gouvernements nationaux ? Ils n'ont rien à faire au niveau fédéral.
Ensuite, il n'y aurait pas d'inclinaison naturelle vers un compromis par le bas des standards démocratiques, et sociaux même (les réactions sécuritaires et conservatrices sont souvent des réactions, plus que des élans spontanés ; surtout, personne ne demande spontanément à vivre dans une telle débauche financière). Parce que les constituants ne sont pas là pour exercer eux-mêmes ensuite ; parce qu'il ne s'agirait pas de faire des règles les plus cohérentes possibles en partant d'un faisceau de règles nationales souvent différentes, mais de commencer par chercher les bases de la cohérence, avant de voir les compromis. Si ces règles, par ailleurs, sont définies pour un niveau fédéral et lui seul, ça lève la plupart des problèmes d'incohérence avec les lois de chaque pays membre. Plus de traité : plus transpositions de directives à faire toute l'année dans les parlements nationaux, ... Et comme la constituante est mandatée par les peuples et que le produit de son travail est validée par les peuples, il n'y a plus de "distorsions de légitimité" à craindre. On verra bien, alors, si les peuples préfèrent des compromis démocratiques et sociaux par le bas ou par le haut...
Ce que vous dites de l'hypercentre est juste, mais vous semblez confondre la coloration et la diversité de la sphère politique et celle qui se trouve dans les peuples, assimiler une volonté générale formée : d'une part, seulement par des réponses à des questions autorisées par les représentants dans un régime déjà établi, d'autre part, par un groupe d'individus libres de commencer par choisir les questions. Cette latitude de sortir des problématiques autorisées est d'autant plus décisive à une époque imprégnée par une idéologie unique (dont l'image de la pensée collective tend à tourner en rond).
"l'incapacité des nonistes qui ont pu empêcher le TCE mais n'ont pas su présenter un texte de substitution."
On fait au mieux, et j'y a personnellement consacré le gros de mes temps libres depuis deux ans. Maintenant, je vous revoie à ce que j'ai écrit précédemment ; si la question (le mandat) autorisée impose déjà de reporter l'essentiel de la structure de l'UE, ne demandez pas de faire miracles à ceux qui, par ailleurs, n'ont pas le micro. Les quelques uns qui ont un bout de tribune sur le papier, au niveau des partis (je pense aux Verts, qui seraient plutôt fédéralistes), comment voulez-vous qu'ils prennent un espace de débat pour vendre leur projet dans des mass-média où la seule question d'une constituante n'a jamais été posée (faites l'essai de le demander, vous verrez) ?
Rédigé par : samium | 10 février 2008 à 12:49
Aviez vous suivi sur son site la "progression" de Mr Etienne Chouard, en terme d'Europe, lors des discussions sur le TCE avant le référendum de 2005 ?
Ses arguments étaient devenus pour beaucoup de "nonistes" l'alpha et l'oméga de la pensée anti-européenne...
Tout ce beau travail rejeté par nos Représentants Démocratiquement Elus, je ne m'étonne pas alors de sa réaction.
Rédigé par : CSN | 10 février 2008 à 14:09
Bonjour,
J'ai une question qui me paraît fondamentale. Je précise que jusqu'à présent ce sont les arguments d'E.Chouard qui m'ont convaincu. Mais je souhaite ébranler mes convictions. Peut-être suis-je dans l'erreur :)
La question la voici. Elle se décompose en trois parties :
1)La séparation des pouvoirs est-elle effective dans l'Union européenne ? Si ce n'est pas le cas, ne s'agit-il pas de la remise en cause de la nature démocratique de nos nations par la mise en place d'un régime oligarchique d'experts éclairés sous couvert de parlements nationaux et européen réduit à n’être que des « chambres d’enregistrement » ?
2) Eu égard aux transferts de souveraineté effectués ou en cours (institutionnels, monétaires, législatif, diplomatiques, militaires, et même exécutifs sous couvert du principe de subsidiarité) l'Union Européenne, qui possédera au 1er janvier 2009 la personnalité juridique telle que prévue dans le traité de Lisbonne, ne deviendra-t-elle pas en cela un "Etat fédéral", et la France de facto un "état fédéré" ?
3)La constitution française, le préambule de la Constitution et la jurisprudence du Conseil Constitutionnee auront-il une valeur supérieure au traité de Lisbonne, à la charte des droits fondamentaux et à la jurisprudence de la cour (suprême) de justice de l'Union européenne ? Certes, il y a le "bon vieux" article 55 qui nous dit que la Constitution est supérieure aux traités, mais cette fois-ci, c'est différent. Le traité de Lisbonne n'est pas un traité comme les autres. Il est moins un traité qu'une constitution avec tout le système institutionnel supraconstitutionnel qu'il met en place. Et la CJCE a toujours dans sa jurisprudence oeuvré (enfin, je crois) pour la supériorité des normes européennes sur les normes nationales.
J'aimerai qu'on m'apporte en ce lieu d'éminences des réponses à ma petite lanterne pour mieux éclairer le modeste citoyen que je suis :)
Et je vous avouerais que je comprends la colère d'Etienne Chouard s'agissant des médias. Puisqu'ils n'ont jamais abordé les questions essentielles énoncés ci-dessus. Etonnant, non ?
Merci ;-)
Rédigé par : Adrien | 10 février 2008 à 16:29
Bonsoir Etienne Chouard, bonsoir Nouche (et merci pour le lien et la citation in extenso de l'article 123). Je suis, comme nous tous, occupé à diverses activités qui nous laissent toujours perplexes devant le temps disponible. Le temps de préparer un point de vue sur l'article 123 et voilà de nouvelles réflexions et prises de position. J'intercale ce petit commentaire. Il s'agit de ce que vous dîtes, les uns et les autres, à propos du système politique européen, notamment Etienne Chouard évoquant l'idée de Constitution, ou Adrien soulignant la faiblesse du Parlement européen. Sur cette question, mon point de vue est le suivant : 1) l'Europe représente aujourd'hui l'espace le plus libéral au monde (au sens où c'est sur ce continent que la liberté, sous toutes ces formes, est le plus déployée, d'un point de vue relatif) ; 2) le processus d'union a donné lieu à une inventivité institutionnelle selon moi unique au monde depuis 1945 (j'y vois même un événement de dimension historique, comparable à la naissance des Etats-nations par son importance) ; 3) tous les pays membres de l'Union ont été **candidats** à l'adhésion, selon un processus relevant indiscutablement de la souveraineté nationale et dans le cadre de régimes politiques nationaux toujours démocratiques (exigence de base de l'Union), c'est en raison de ce mouvement volontaire, libre, donnant lieu à un modèle d'extension d'un ensemble sans violence ni domination des pays adhérents que j'ai proposé la notion de "désempire" pour qualifier l'UE (processus unique dans l'histoire) ; 4) ce phénomène inédit et radicalement innovant a produit des formes institutionnelles hybridées, inhabituelles : le PE est ainsi dans l'histoire et dans le monde la seule assemblée transnationale élue au suffrage universel direct ; la double citoyenneté, revenant à détacher la citoyenneté de la nationalité, etc. ; 5) j'y vois les possibilités d'un progrès substantiel dans le cadre d'un humanisme cosmopolite ; 6) tout cela n'a pas été pensé, mais résulte d'une succession de réformes et d'avancées soutenues par l'idée fondamentale d'une coopération croissante (pacification, développement des échanges économiques, solidarité en valeurs, etc.) ; 7) comme cela n'a pas été pensé alors que la marche est radicalement innovante, les formes qui surgissent peu à peu échappent non seulement pour partie au contrôle mais aussi au concept : ex : nous avons parlé de "constitution" pour qualifier feu le TCE, qui n'était ni un traité ni une constitution ; résultat, lu comme un traité, cela paraissait étrange (voire dissimulateur), lu comme une constitution cela devenait douteux (voire soupçonnable de régression démocratique) ; 8) en fait, mon sentiment est que nous sommes devant un phénomène historique d'une telle nouveauté, que nous devons rebâtir un vocabulaire approprié. Nous parlons de "Constitution", de "Parlement", de séparation des pouvoirs, etc., comme si l'Union était une nation en grand, une démocratie en grand, un Etat en grand. Je crois que ce n'est pas cela, que cela ne sera jamais cela. Si nous appliquons à cet objet les catégories classiques de l'Etat nation et de la démocratie nationale, nous ne nous y retrouverons jamais, nous ne verrons que l'écart par rapport à la norme (cette norme qui était critiquée quand elle était nationale au nom de la démocratie réelle s'opposant à la démocratie formelle mais qui devient maintenant la référence, l'étalon par lequel on discrédite l'effort d'internationalisation du système...). Je pose que les Européens ont eu 1000 fois raison de décider d'engager une coopération étroite pour éviter les nouveaux ravages du nationalisme après 1945. Je note que l'on a d'abord tenté de mettre en place un système économique de coopération ; puis que l'on a tenté d'injecter des procédures démocratie dans ce système au départ purement économique (pourquoi donc faire élire le PE au suffrage universel direct à partir de 1979 ?) ; sans ces efforts pour politiser la coopération inter-étatique, nous n'aurions qu'un espace de libre-échange et beaucoup s'en sont plaint au nom de la démocratie ; en réponse, l'invention d'un PE et d'une double citoyenneté appelle aussitôt la critique au motif d'insatisfaction : le PE a trop peu de pouvoirs (cela suppose-t-il que les Parlements nationaux en possèdent bcq ?) ; il n'y a pas de véritable séparation des pouvoirs (à la différence de la France où elle ne fait aucun doute, etc.), tandis qu'aucun Etat membre ne souhaite la fédération, c'est-à-dire s'oppose à la séparation des pouvoirs qui l'annoncerait... Pour terminer ici, mon sentiment est que l'Union européenne représente à ce jour la seule tentative sérieuse d'organiser un pouvoir transnational placé sous contraintes, y compris sous la contrainte d'un corps de valeurs à respecter ainsi que la contrainte de la justification, de la confirmité au droit, du contrôle populaire, etc. Cet effort est une invention permanente et, en tant que tel, une forme inachevée qui nous projette inévitablement dans un futur relativement indéterminé et inconnu. Inutile donc de chausser les lunettes classiques pour y voir plus clair. Seul le travail de l'engagement critique sera utile et fécond. Mais voilà, cela suppose d'adhérer préalablement à l'idée d'une oeuvre politique transnationale et cela suppose de considérer que ce qui est inachevé est à prolonger mais aussi très supérieur à ce qui n'a même pas été esquissé.
Rédigé par : Reynié | 10 février 2008 à 20:03
A Reynié :
ce que vous dites est séduisant et plutôt neuf. Seulement :
sur les empires totalitaires, toujours en mouvement, observés de leur vivant et de l'intérieur, on peut dire des merveilles. La nouveauté y grise tellement qu'on n'a plus qu'à s'habituer à l'aimer. Plus le temps passe, pourtant, plus ce que vous entendez à de quoi vous faire tiquer. La guerre économique, c'est paix, par exemple... On nous résumerait avec ces mots ce qu'on nous chante pourtant bel et bien toute l'année, ça ferait peut-être réagir certains.
Qu'on puisse inventer de nouvelles formes de sociétés, de pays, je n'ai pas de mot, même des désempires, sans doute. Mais les fondements du régime constitutionnel, contraire de la tyrannie, ils sont connus depuis 1500 ans au bas mot ; les recettes de la république existaient très longtemps avant les États nations. Et personne n'a pu montrer que cette "merveille" d'UE, vue en statique ou en dynamique, avait de quoi rassurer un minimum au regard du BA-Ba de ces règles. Mais dans les totalitarismes, les gens se foutent de tout ça, ils perdent jusqu'à la connaissance du BA-Ba et de tout ce que le conservatisme a de bon.
Dans l'UE, il a les pires violations d'une constitution. Non pas seulement une absence totale de séparation des pouvoirs, non pas juste des élus, tous les élus privés de tout droit d'initiative en tous domaines, de toutes nature, à commencer par la modification des règles, mais aussi des clauses para-constitutionnelles typiques qui interdisent aux pouvoirs publics un tas de choses pour protéger non pas des individus, tous les individus, mais des féodalités. J'arrête là, que voulez-vous. Je préfèrerais que vous lisiez mon précédent message, qui vous est adressé.
Rédigé par : samium | 10 février 2008 à 23:08
à Reynié,
pour reformuler votre vision de l'Europe, et voir si je la comprends bien :
vous regardez le traité de Lisbonne placé dans son contexte : celui de l'histoire de la construction européenne. Cela rend cette vision optimiste parce que c'est une construction qui s'est faite petit à petit sans jamais savoir où les différents États qui composent l'Europe voudraient aller ensuite, que la volonté des États a toujours été vers plus de coopération, que l'organisation d'un pouvoir transnational (mais sans la fédération des États qui en font partie) est unique et de ce fait à inventer. Et ce qui existe aujourd'hui compte-tenu de toute cette histoire vous semble très satisfaisant, et vous semble pouvoir évoluer vers un fonctionnement positif pour les peuples.
Désolée de simplifier et probablement déformer ainsi votre texte mais j'essaie de comprendre les différents points de vues, avec mon niveau actuel de vocabulaire et de connaissance des institutions (bas).
Si j'ai à peu près perçu votre pensée, j'ai envie de vous poser les questions suivantes :
pourquoi une séparation des pouvoirs n'est-elle possible que s'il y a fédération des États ?
pourquoi le conseil (pouvoir législatif au niveau européen) est-il constitué de ministres (pouvoir exécutif au niveau national ET non élu au suffrage universel)?
ne pourrait-on envisager un parlement européen qui ait un pouvoir législatif dans tous les domaines et un pouvoir au moins égal à celui du conseil ?
Rédigé par : Nouche | 10 février 2008 à 23:22
Encore deux interrogations :
Pourquoi ne pas profiter de la construction européenne pour insuffler plus de démocratie participative (référendum d'initiative populaire) et plus de protections contre les abus de pouvoir (mettre en place plus de contre-pouvoirs, limiter le nombre d'années passées en politique, limiter le nombre de mandats, comptabiliser enfin le bulletin blanc lors des élections) ainsi que contre la prise de pouvoir par les grands groupes notamment au niveau des médias (achat des médias par des grands groupes privés, que l'on ne peut nier, c'est notre réalité aujourd'hui)
Est-il fondé que les traités sur l'Union Européenne et sur le Fonctionnement de l'Union Européenne modifiés par le traité de Lisbonne ne pourront plus être modifiés passée leur date d'application que par des procédures très lourdes demandant la double unanimité, c'est-à-dire, quasiment in changeables ? Ce serait alors peine perdue que tous ces débats, ne trouvez-vous pas ?
Rédigé par : Nouche | 10 février 2008 à 23:40
Bonsoir,
Merci de prendre du temps pour cet échange.
Ce que je craignais arrive (mais je ne désespère pas). Vous parlez ici d'autre chose que moi (comme d’habitude, pourrait-on dire sans malice) : pas une fois vous ne venez sur mon (notre) terrain et vous ne répondez donc à aucune de mes (nos) inquiétudes.
Cela interdit le débat. C’est habile si c’est volontaire (mais je n’en sais rien et j’ai promis de ne pas faire de procès d’intention), mais ça commence à se voir : le débat **sur les points qui font problème** n’a pas lieu.
On est — encore et toujours — dans ce dialogue de sourds qui nous interdit de parler de l’essentiel.
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Vous vous payez de mots (vous semblez beaucoup trop optimiste), je crois, en oubliant carrément à quoi sert une Constitution (et ce qu’on risque tous à ne pas en avoir une bonne pour nous protéger) :
Qu'avons-nous à gagner, en effet, nous autres citoyens, je vous le demande, à vos "innovations" juridiques extraordinaires si nous y perdons le contrôle des pouvoirs, la responsabilité des acteurs, l’indépendance des juges, la publicité des débats qui comptent, la force de notre suffrage, la souveraineté monétaire même !, et finalement, la plupart des avancées démocratiques que nos parents avaient si durement gagnées ?
Quel est l’intérêt pour nous de cette « inventivité institutionnelle » qui semble tant vous séduire alors qu’elle débouche, concrètement, factuellement, indéniablement, sur ce que nos comptables de gouvernants appellent un « déficit démocratique » (détestable expression, vraiment, digne de « l’idéologie gestionnaire » dénoncée par Vincent de Gaulejac), c’est-à-dire une démocratie FACTICE où tous les rouages démocratiques sont vidés de leur substance ? Un parlement sans pouvoir, des organes sans responsabilité, des lieux de débat public qui ne sont pas les lieux où se préparent vraiment les décisions, un suffrage universel privé d’effet, des juges dont la carrière dépend des exécutifs qu’ils auront à juger, etc.
Que nous importe de construire un système « unique au monde » s’il devient objectivement totalitaire, mensonger, hors contrôle (selon des modalités prévues au millimètre par Tocqueville, d’ailleurs) ?
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Vous soulignez que notre continent est « le plus libéral au monde », mais si cela est vrai, cela ne doit rien à l’UE, il me semble ; bien au contraire puisque cette UE envahissante empiète de plus en plus sur nos souverainetés diverses et que nos leviers juridiques de résistance semblent précisément s’amoindrir à vue d’œil.
On dirait même que jamais les grandes firmes n’ont été autant en mesure d’écrire aussi directement le droit (les normes obligatoires de portée générale et sans limitation dans le temps) comme elles peuvent le faire avec les rouages de l’UE qu’elles ont tant souhaitée ; je pense, par exemple, à l’opacité absolue de la procédure du « Comité 133 » pour préparer le droit européen. Vous connaissez évidemment ce Comité 133 (du nom de l’article qui le prévoit) ; est-ce que vous pourriez nous expliquer la curieuse conception de la démocratie qui conduit à y refuser les parlementaires mais à y inviter tous les lobbyistes de la création — tout ça à huis clos ?
Le fait que ce soit « inédit et radicalement innovant » ne me console nullement de la tyrannie des firmes transnationales dont vous préparez le règne (sans le vouloir, sans doute).
Quand je vous vois « créer des notions » « uniques dans l’histoire », comme celle de « désempire », j’ai l’impression que vous participez à UN JEU de droit où un prix sera décerné au plus imaginatif… sans qu’aucune importance ne soit apparemment accordée au contrôle des pouvoirs et à la protection des hommes contre les abus…
Voudriez-vous me dire comment vous allez résister à un abus de pouvoir, dans vos institutions « radicalement innovantes », s’il vous plaît ?
Vous dites que rien de tout cela n’a été pensé et que tout ça s’est fait en marchant… Vous le dites sans le prouver (ce serait effectivement difficile à prouver). Pour ma part, je devine tout le contraire, tant ce système sert grassement à quelques uns. Je ne sais pas ce qui vous pousse à ne pas voir (à ne pas vouloir voir ?) à qui profite le système.
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Vous dites que « le PE est ainsi dans l'histoire et dans le monde la seule assemblée transnationale élue au suffrage universel direct »… La belle affaire…
Vous savez bien que, d’autre part, ce « Parlement croupion » n’a même pas l’initiative des lois, ni la souveraineté de décider quoi que ce soit sans la férule des ministres, — réunis en bande pour se grimer en « co-législateurs », comme un loup couvert d’une peau de mouton, de qui se moque-t-on ? (*) — et qu’il y a même des sujets sur lesquels il n’a pas même de droit de regard (aucune liste n’est d’ailleurs proposée des domaines des « procédures législatives spéciales », il faut les chercher un par un parmi des centaines d’articles abscons).
Alors, quel est donc votre étrange sens du discernement, vous qui n’attirez notre attention que sur le mode de désignation du Parlement, sans relever la désespérante faiblesse des ses pouvoirs (lui qui est pourtant le seul organe élu) ?
Ce n’est pas moi, quand même, qui vais apprendre à un professeur de Sciences Po que ceux qui réduisent la démocratie à l’élection d’une Assemblée, a fortiori sans pouvoir, se foutent du monde, n’est-ce pas ?
D’ailleurs, vous pourriez peut-être m’expliquer (si vous le savez vous-même) à la fois la légitimité de ces « lois sans parlement » que sont les « procédures législatives spéciales », et la bonne raison, selon vous, de n’en dresser la liste nulle part. À tout le moins, reconnaissez que ça ne respire pas l’honnêteté : pourquoi cacher tout cela ?
Avez-vous le souvenir d’un seul débat public sur ce sujet, un seul ?
Vous trouvez ça normal ?
Ce serait vraiment très constructif que vous nous exposiez précisément ce point des « procédures législatives spéciales » que tous les ouiistes semblent fuir comme la peste.
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Vous nous annoncez qu’il faut nous préparer à revoir tout notre vocabulaire parce que les concepts anciens sont dépassés et qu’on n’arrivera pas à faire rentrer l’UE dans ces « normes » désuètes…
Je n’en crois pas mes yeux.
Ce que je vous ai dit à propos du rôle fondamental d’une constitution contre les abus de pouvoir et des rouages fondateurs d’une démocratie n’a rien à voir avec « une norme » : c’est le résultat d’un raisonnement majeur, le fruit d’une réflexion profonde et ancienne : le pouvoir va jusqu’à la limite ; pour que le pouvoir n’abuse pas, il faut que le pouvoir arrête le pouvoir.
Vous trouvez ça vieillot, OK.
Mais si vous ne mettez RIEN À LA PLACE, vous êtes tous parfaitement irresponsables et vous nous jetez dans la gueule des tyrans qui ne manqueront pas de profiter de cette incurie. Je suis consterné par le vide qui reste derrière la table rase que vous faites apparemment des « catégories classiques ».
Vous dites « Inutile de chausser les lunettes classiques pour y voir plus clair », mais j’y vois une pirouette pour s’affranchir de tout contrôle, désolé. Je ne sais pas de quel bord vous me parlez, mais tout cela ne semble pas acceptable du tout : c’est beaucoup trop dangereux, vous ne mettez rien de sûr à la place de ce que vous détruisez par goût de la nouveauté.
Moi, c’est pour ça, principalement, que j’ai résisté contre le TCE : le plus dangereux, dans tous ces traités, c’est de loin la partie I, la partie institutionnelle, celle qui organise et verrouille l’impuissance politique des citoyens, et celle qui ouvre un boulevard à la gouvenance par les grandes entreprises.
Quand je pense que notre président, ce menteur, ce bonimenteur de foire, nous serine sans arrêt (sans jamais se confronter à la contradiction) que la partie I faisait consensus, que personne ne la contestait et qu’il n’y avait donc aucun problème à nous l’imposer… J’enrage de tant de malhonnêteté.
Et la Déclaration des droits de l’homme, la vraie, celle de 1793, me revient forcément en tête : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs. » (article 35).
Et en plus, vous nous imposez de force, en allant **contre** un référendum limpide, ce système dangereux où les hommes au pouvoir sont passés sous la coupe des lobbies et se sont affranchis de tout contrôle citoyen…
C’est sûrement un malentendu, dites-moi vite que je vous ai mal compris, s’il vous plaît.
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Si je peux me permettre, vous n’avez toujours pas démontré une seule des prétendues « simplifications outrancières » que vous me prêtiez dans votre billet et qui devaient justifier, selon vous, une petite censure, si la rédaction de rue89, au lieu de montrer une « étonnante complaisance », s’était comportée comme les rédactions auxquelles vous êtes habitué.
Je reste très curieux, pour progresser, d’étudier une démonstration dans ce sens.
Dans l’attente de vous lire.
Étienne.
(*) Un ministre qui écrit le droit qu’il va appliquer, c’est la définition même de la confusion des pouvoirs. Croient-ils, ces Ministres, qu’on ne les voit pas s’autonomiser ?
Et le fait qu’une confusion des pouvoirs similaire règne en France depuis 1958 ne diminue en rien ce vice majeur des institutions européennes : un parlement faible et des « ministres législateurs » (Montesquieu fait la toupie dans sa tombe) : **un excès n’en justifie pas un autre**, évidemment, et la 5ème République, cette monarchie qui n’a rien de démocratique, ne doit surtout pas servir de référence pour construire l’Europe de nos rêves.
Rédigé par : Étienne Chouard | 11 février 2008 à 02:10
M. Chouard, je vous invite à lire les écrits d'Altiero Spinelli, député italien (chez les Communistes) qui proposent des améliorations du système actuel, notamment pour arriver à une Europe fédérale.
Vous verrez que cet homme épris de liberté (après son emprisonnement par les fascistes sur l'île de Ventotene) fait des propositions sur les institutions actuelles et non la révolution. Cette démarche me correspond plus que celle vous proposez en faisant référence à cet article de la déclaration de 1793.
D'ailleurs, nous n'en sommes pas encore là. Puisque si vous n'êtes pas d'accord avec "les violeurs", mais présentez-vous aux élections avec vos si nombreux amis pour voir le choix du "peuple".
Vous traitez le Parlement européen de "parlement croupion". Vous insultez le travail des parlementaires européens alors que ceux-ci font le plus souvent un grand travail de consensus.
Par exemple, sur la directive "services" ou sur la directive "reach".
Et quand ce Parlement empêche la nomination à la Commission d'un prêtre italien qui tient des propos homophobes, il n'a aucun rôle ?
Avec le traité de Lisbonne (s'il est ratifié partout), le Conseil sera obligé de tenir compte de la majorité parlementaire. Si les partis européens font campagne avec un programme "européen" et une tête de liste, le Conseil ne pourra pas nommer une autre personne sans courir le risque d'une censure par le Parlement européen.
Ce serait révolutionnaire.
Attendez, j'entends déjà arriver votre "mais de qui se moque-t-on ?".
:-p
Rédigé par : Fabien | 11 février 2008 à 10:01
Fabien écrit " mais présentez-vous aux élections avec vos si nombreux amis pour voir le choix du "peuple" "
Voilà une proposition qui me plait (ce serait une excellente plate forme pour ouvrir les yeux des européens sur ce que nous prépare "cette europe" sans réelle vision politique de justice sociale, mais pour cela, il faut des budgets conséquents que n'ont plus que les partis politiques installés...
Rédigé par : Stilgard | 11 février 2008 à 10:10
Fabien,
Reach (avec tous les lobbys, ces grands représentants la "société civile" qui ont limité les ambitions initiales, ne nous le cachons pas, c'est totalemet avéré) et la directive services (dont la première mouture, la fameuse "Bolkestein" est quasipassé comme une lettre à la poste) sont de forts mauvais exemples. Vous auriez pu trouver beaucoup mieux. Je crois même que vous avez citer les "pires" :-)
Je ne pense pas qu'Etienne "insulte" le Parlement européen ou ses parlementaires. Il cherche à déterminer son rôle au sein des institutions européennes. Et dans le cadre prévu par le traité de Lisbonne son rôle se réduit au role de chambre d'enregistrement. Le Parlement peut amender certes, il peut voter les lois européennes (réglements, directives) certes (mais, il n'a pas le dernier mot, dans la plupart des cas, c'est le Conseil). Mais, fait étonnant pour un "Parlement", censé "représenter la souveraineté du peuple", il n'a pas le pouvoir d'initiative legislative. C'est la commission qui en a le monopole. Or cette commission, est un gouvernement, (qui ne dit pas son nom), un groupe de ministres sans aucune légitimité démocratique. Son investiture par le Parlement et le procédé de la motion de censure à son égard peuvent paraître comme des "contrepouvoirs" intéressants, mais en réalité, cela ne légitime nullement le caractère absolument antidémocratique du transfert du pouvoir de souveraineté d'initative législative. Pardon, mais ce n'est pas rien.
Et que dire de la confusion des pouvoirs du Conseil des ministres dont les membres cumulent le pouvoir législatif au niveau européen, pouvoir supérieur à celui du Parlement européen, et pouvoir exécutif au niveau national. Pouvoirs sans contrepouvoirs ; sinon le contrepouvoir (non-démocratique) de la Commission européenne dans l'exécution des normes européennes prises qui peut attaquer devant la CJCE les états-membres en cas de non-application des décisions prises. Bref, on voit bien que "ceux qui votent les lois à Bruxelles, sont ceux là-même qui les mettent en application chez eux".
PS : En ce qui me concerne, je ne vois pas pourquoi les tenants d'une Europe plus démocratique devrait jouer le jeu des éléctions de l'Union européenne, un systéme oligarchique d'experts dont les éléctions d'un Parlement "fantoche" ne sont que la caution morale, l'illusion démocratique. Une fois élu, le Parlementaire ne peut rien changer, il est dans son rôle. Il investit la commission, il amende les textes qu'on a préparé en commission (c'est très bien! mais très insuffisant), il vote (dans le sens du Conseil) ou sinon on se passe du Parlement.
PS 2 : Fabien, pouvez-vous m'expliquer comment le Conseil devra tenir compte de la majorité parlementaire ? C'est une idée intéressante, et à laquelle pour l'instant, je ne suis pas en mesure de souscrire.
Rédigé par : Adrien | 11 février 2008 à 11:04
@Adrien : vous vous trompez sur le rôle réel du Parlement européen.
Je vous invite à comparer le rôle effectif d'un eurodéputé à celui d'un député français. Alors que vous concentrez votre critique sur l'Europe force est pourtant de constater que en pratique - mais aussi de lus en plus en droit - le député européen a, dans le système institutionnel où il s'insère, un rôle bien plus significatif que l'élu à l'Assemblée nationale.
En outre le Parlement européen est plus représentatif des rapports de force politiques dans la société du fait de son élection selon un mode de scrutin proportionnel.
Je vous invite à considérer les faits suivants :
- le Parlement européen a un rôle déterminant lors de la nomination d'une nouvelle Commission européenne. Les eurodéputés entendent notamment les membres de la Commission proposée lors d'auditions qui sont une épreuve assez rigoureuse. Les ministres français - heureusement pour eux - ne sont pas confrontés à ce type d'audition. Lors de la dernière élection, le Parlement européen a obtenu le retrait d'un candidat contestable.
- lorsque un commissaire a eu des comportements inappropriés, Mme Cresson en l'occurrence, c'est toute la Commission qui a démissionné suite à la pression du Parlement européen. Un gouvernement français, même très impopulaire, même confronté à des affaires, ne démissionne pas du fait du mécontentement des députés français ;
- les lois européennes doivent avoir l'accord du Parlement européen. Les amendements des eurodéputés sont donc très souvent repris. C'est bien plus rarement le cas en ce qui concerne les amendements présentés par les députés français. Dans certains cas le travail du parlement européen change considérablement le sens d'un texte. Ainsi la directive sur les services a été réécrite en faisant dispaître les clauses contestées. En outre plusieurs textes ont été repoussés lors de la législature en cours. Quand l'Assemblée nationale a-t-elle repoussée un texte d'origine gouvernemental ?
Cf. http://www.taurillon.org/Garant-de-l-interet-general-le
Je vous invite donc d'une part à réévaluer votre jugement sur le travail de nos eurodéputés et d'autre part à ne pas appliquer deux poids et deux mesure aux élus européens et aux élus français. Si la Constitution française prévoyait un travail parlementaire de la qualité et de l'importance de celui du Parlement européen j'en serais bien plus satisfait.
Enfin, bien sur, il faut encore améliorer les institutions européennes. C'est ce que proposent les militants fédéralistes et de ce point de vue le traité de Lisbonne est insuffisant.
Pourtant ce qui me dérange dans certains commentaires c'est non seulement qu'ils ne reflètent pas la réalité des choses tel qu'elles se passent effectivement au niveau européen mais aussi parce qu'ils semblent promouvoir l'idée d'un régime d'assemblée. L'Union est composée à la fois de peuples et d'Etats. Il est important que le système politique européen le prenne en copte. S'il faut rééquilibrer le système pour que les élus aient un rôle plus important encore que celui qu'ils ont actuellement, leur donner tout le pouvoir serait appliquer au niveau européenne une vision jacobine de la démocratie qui me semble peu pertinente.
Rédigé par : Valéry | 11 février 2008 à 13:59