L’édition 2008 de L’Opinion européenne est en cours de publication. En avant-première, voici, une information, développée dans le volume à venir. Elle concerne le poids électoral des forces politiques européennes hostiles à l’Union, qu’elles soient d’extrême gauche ou d’extrême droite : entre 1996 et 2007, on peut observer au total 85 séries d’élections législatives nationales dans les pays de l’Union. L’analyse des données montre que, sur l’ensemble de la période, le poids moyen de ces formations représente 5,4% des électeurs inscrits pour l’extrême droite et 2,3% pour l’extrême gauche. Par ailleurs, lors des élections européennes de 2004, en attendant celles de 2009, Corinne Deloy et moi-même, avions identifié 96 listes «eurocritiques», de droite comme de gauche, sur un total de 452 listes. Ces 96 listes eurocritiques ont rassemblé au total 16% des suffrages exprimés pour l’ensemble de l’Union. Parmi ces 96 listes «eurocritiques», 5 listes seulement faisaient explicitement figurer dans leur programme le retrait de l’Union: 1) le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni ; 2) les Verts ainsi que 3) le Parti de la gauche, en Suède ; 4) la Ligue des familles, en Pologne ; et enfin 5) le Front national, en France. Ces 5 listes «souverainistes» représentaient alors 12,5% des suffrages exprimés des 4 pays concernés et… 4,5% de leurs électeurs inscrits. C’est le souverainisme sans le peuple.
Merci pour ces chiffres inétressants et rassurants.
Toutefois si l'on considère, plus largement les partis "eurosceptiques", c'est à dire qui sans vouloir ouvertement quitter l'Union, proposent des mesures visant à la bloquer (comme le rétablissement du droit de veto dans tous les domaines) et donc à la vider de son sens, le camp nationaliste est plus fort.
Le PS maltais ou la droite britannique ne sont ils pas à prendre en compte pour juger du poids électoral réel des adversaires de la consctruction européenne ? à moins qu'elles ne soient comptabilisées dans les 96 listes dites "eurocritiques" ?
Pour la France, si on additionne les votes des candidats des partis anti-systèmes, tous hostiles à l'Union européenne, on comptabilisait aux présidentielles de 2002 un vote allant à plus de 40% des suffrages exprimés. L'élection de 2002 était il est vrai exceptionnelle de ce point de vue et l'on peut espérer que ce soit leur potentiel maximal. Seul le ralliement d'un Fabius et le mécontentement anti-chirac ont pu voir des électeurs modérés rejoindre cet électoral protestataire en 2005.
Vous avez en toute hypothèse raison de rappeller que si l'Europe avance, tant bien que mal, c'est bien parce que les électeurs ne donnent pas de majorité à ses adversaires. De ce point de vue gageons que, quelque soit la faiblesse des scores qu'ils obtiennent dans les années à venir, ils nous reparlent encore de l'incident de 2005 pendant 15 ou 20 ans.
Rédigé par : valéry | 01 février 2008 à 13:40
Il y a eu en effet des crises nationales où l'on a vu, ponctuellement, des formations anti-européennes atteindre des niveaux relativement élevés. C'est pourquoi j'ai proposé de prendre en considération la période 1996-2007 et ses 85 élections législatives nationales. Cela permet de lisser les résultats. Pour ce qui concerne les conservateurs britanniques ou les travaillistes maltais, c'est en effet un point de discussion. Dans les listes anti-europe il n'y a en fait que des formations protestataires : les partis de gouvernement peuvent utiliser l'Europe comme bouc émissaire, pendant la conquête ou pendant l'exercice du pouvoir - beaucoup le font en Europe, comme vous savez...- mais ils gouvernent cependant sans remettre en cause leur appartenance à l'Union. Les moulinets eurocritiques ne suffisent pas à faire une liste anti-européenne, il faut prendre en compte les actes, les faits. Or, seuls les partis de gouvernement sont à même de subir l'épreuve du fait, laquelle est presque toujours favorable à l'Union. C'est l'exercice du pouvoir qui rend européen, voyez l'heureuse reconversion de Chirac à partir de 1986. C'est cela qui a permis de faire du RPR un parti du "oui" à Maastricht. A l'inverse, le fait d'être contenu dans l'opposition peut vous permettre de dire n'importe quoi pour tenter de retrouver les faveurs de l'opinion, cette fois c'est le cas Fabius qui mérite examen, pour en rester au niveau des Premiers ministres.
Rédigé par : Reynié | 01 février 2008 à 18:52
A Valery: juste une précision: le PS maltais a voté la ratification du traité de Lisbonne. Même lui a fini par évoluer...
Rédigé par : Jean Quatremer | 06 février 2008 à 01:56